Bienvenue, Léon XIV!

Charles de Pechpeyrou

«Tous les jours, nous irons voir la fumée…» C’est ainsi que beaucoup de Romains et de pèlerins ont vécu les journées précédant le Conclave, dans une forme d’attente impatiente, populaire et joyeuse. Pendant plus de 24 heures, des centaines de millions de personnes ont vécu le regard braqué sur une cheminée de cuivre, en commentant le ballet des goélands.

Dans les grands moments récents de la vie de l’Eglise, de la dernière bénédiction de François à la foule le Lundi de Pâques à ses funérailles puis à l’élection du nouveau Pape, il était beau de voir la foule unie par une même émotion et une même prière, dans la diversité des visages singuliers, corps compact visible sur la Place Saint-Pierre et au-delà. Dans chacun de ces événements, il s’est éprouvé quelque chose de l’ordre de «l’harmonie» de la Pentecôte. «L’Esprit Saint déclenche un dynamisme profond et varié dans la communauté ecclésiale — rappelait le Pape François dans son dis-cours d’ouverture du synode le 4 octobre 2023 —: “le tumulte” de la Pentecôte (…) Ce matin-là, il y a un tumulte, on parle toutes les langues, tout le monde comprend… Mais c’est une variété dont on ne comprend pas bien le sens… Et après cela, la grande œuvre de l’Esprit Saint: Il nous unit dans l’harmonie de toutes les différences. S’il n’y a pas d’harmonie, il n’y a pas d’Esprit: c’est Lui qui fait cela». A rebours de «la confusion des langages sans amour, souvent idéologiques ou partisans» de «la tour de Babel», contre laquelle le Pape Léon XIV a mis en garde lors de son audience aux professionnels de la communication du 12 mai.

L’élection du Pape Léon XIV a déjà suscité des milliers d’articles dans le monde entier, et chacun cherche à comprendre le 266e Successeur de Pierre. A décrypter son histoire pour essayer de déterminer quel Pape il sera. A percer le mystère. Les analyses circulent à la vitesse de la lumière, dans notre monde hyperconnecté, accéléré par l’instantanéité des réseaux sociaux. «Quel qu’il soit, j’apprendrai à l’aimer», confiait simplement une dame interrogée au journal télévisé, la veille du grand jour. Ainsi, il y a dans la capacité du Peuple de Dieu à accueillir «ses» Papes de manière enthousiaste et spontanée, tels qu’ils sont, et à vouloir apprendre à les aimer a priori, avant même de chercher à les caractériser, en laissant le temps de la rencontre, une fraîcheur, une jeunesse d’âme et de cœur qu’il est bon de contempler. Car cette capacité à retrouver collectivement la justesse d’un cœur d’enfant est ferment d’unité, de paix et de charité, vertus au cœur de la première prise de parole du Pape. «Je ne prétends pas confondre l’esprit de jeunesse et celui de charité, je ne suis pas théologien — écrivait Georges Bernanos — l’expérience m’a seulement appris qu’on ne rencontre jamais l’un sans l’autre». Bienvenue au Pape Léon XIV!