
Après son arrivée à l’aéroport d’Ajaccio, le Pape François a reçu un accueil très chaleureux de la part des Corses, venus en nombre pour cette journée historique. Dans la rue ou depuis les balcons, une foule immense, agitant des banderoles et des drapeaux du Vatican, a fêté la première visite d’un Souverain Pontife sur cette île française de la Méditerranée.
Depuis une semaine, la pluie battait les rues d’Ajaccio. Mais ce dimanche 15 décembre, c’est un chaud soleil se reflétant sur les eaux de la Méditerranée qui a accueilli le Pape François pour son 47e voyage apostolique depuis son élection en 2013.
Si les rayons du soleil ont réchauffé la ville, les sourires et la joie des Corses formant une gigantesque haie d’honneur le long du parcours du Saint-Père ont sans nul doute réchauffé son cœur. Entre mer et montagne, plage et asphalte, le chef-lieu de l’île de Beau-té s’est préparé depuis des semaines pour accueillir «Papa Francescu», avec un u comme le veut la langue corse. Les innombrables banderoles lui souhaitant une bienvenue, les drapeaux, les cris d’accueil, les fleurs… L’ambiance ce matin dans les rues d’Ajaccio était unique, avec la présence d’environ 120.000 personnes, soit le tiers de la population corse.
Dès son arrivée à l’aéroport dédié à Napoléon, le Saint-Père n’a sans doute même pas eu le temps de regarder le paysage environnant. Dans sa nouvelle papamobile, le regard de François s’est immédiatement tourné vers la foule, dont certains s’étaient levés aux aurores pour l’accueillir. Vers ces dizaines de milliers de personnes qui, depuis les balcons ornés de fleurs blanches et jaunes ou de drapeaux à tête de Maure, symbole de la Corse. Certains étaient même perchés sur des branches d’arbres et criaient «Vivu Papa! Vivu Papa!».
De la foule, ou plutôt des nombreuses petites foules, pressées dans les rues ou à l’ombre des boulangeries et brasseries aux noms caractéristiques («A calata», «A marinata», pour n’en citer que quelques-uns), se détachent surtout les robes de couleur rouge, violette, noire et blanche des confréries, ces nombreuses confréries qui caractérisent l’Eglise corse et incarnent cette «piété populaire», leitmotiv de la visite pontificale.
Certaines ont amené dans la rue, sur des chaises à porteurs, des statues de Notre-Dame et de saint Joseph, des icônes de Notre-Dame et des petites crèches. Ils ont accompagné le passage de la voiture papale par des chants et des prières, depuis l’aéroport jus-qu’au Palais des congrès. François a parcouru 200 mètres en une demi-heure environ, voulant s’arrêter à chaque pas pour saluer les enfants, bénir les nouveau-nés et serrer la main de quelques femmes âgées.
Le premier arrêt du cortège du Pape s’est fait devant le baptistère Saint-Jean. Accueilli par une chorale d’enfants et des membres de confréries, François a béni ce témoin de la première évangélisation sur l’île. Datant du vie siècle, ce bâtiment n’a refait surface qu’en 2005 lors de travaux de -fouilles pour construire un parking public. Un enfant a lu le Credo, puis le Pape a salué les fidèles présents.
Après la clôture du Colloque sur la religiosité populaire en Méditerranée, où des membres de confréries l’ont accueilli par des chants traditionnels, le Pape François est reparti en direction de la cathédrale Notre-Dame de l’Assomption.
La voiture papale s’est arrêtée devant la statue de la Vierge de la Miséricorde. Patronne de la Corse, que les catholiques de l’île — environ 90% des habitants — vénèrent sous le nom de «Madonuccia», un surnom qui n’est pas seulement une particularité linguistique, mais aussi une marque d’affection de la population. Tous les 18 mars, elle est vénérée au cours d’une procession en souvenir d’un épisode miraculeux qui lui est attribué en 1656. Alors qu’une épidémie de peste touchait gravement l’Italie, y compris la ville de Gênes dont la Corse dépendait alors, le cours du vent changea en empêchant les navires chargés de malades d’accoster dans les ports corses, et donc empêcher la propagation de l’épidémie.
Placée dans la niche d’une maison, aujourd'hui ornée de guirlandes bleues et vertes, dans la partie haute de la place Foch (dite place des Palmiers), le Pape a voulu rendre hommage à la Madonuccia avant de rencontrer les prêtres et personnes consacrées dans la cathédrale Sainte-Marie de l’Assomption. Un jeune garçon a présenté un cierge au Souverain Pontife, qui l’a allumé avant d’observer un temps de prière en silence, suivi par bref intermède musical.
Dans l’après-midi, la messe présidée par le Saint-Père était une nouvelle étape marquante de cette visite historique, chapitre inédit de l’histoire de ce peuple si fier.
Salvatore Cernuzio
et Jean-Benoît Harel