Le conflit en Libye ne fait plus la une des journaux. Pourtant, le pays vit dans le chaos depuis 2011, lorsque, sur la vague du «printemps arabe», une révolte soutenue par l'otan a renversé puis tué le dirigeant Mohamed Kadhafi. Le territoire est aujourd'hui dominé par deux gouvernements rivaux, chacun soutenu par une série de troupes armées et différents protagonistes étrangers: Tripoli et le nord-ouest sont contrôlés par le «gouvernement d'union nationale (gna) reconnu par l'onu et par l'ue (excepté la France), qui bénéficie du soutien de la Turquie et des Etats-Unis. L’est et de vastes zones du centre-sud sont sous l'autorité de la Chambre des réprésentants de Tobrouk, dans la Cyrénaïque, dont le général Khalifa Haftar — autrefois très proche, puis ennemi de -Mohamed Kadhafi — est l'homme fort.
Trois ans après la sortie de scène du dirigeant libyen, lorsque les accords passés entre les factions en guerre échouent, une seconde guerre civile commence à Derna et à Syrthe, à laquelle l'autoproclamé Etat islamique (ei) prend part. En 2016, à Tripoli, un accord négocié sous l'égide de l'onu mène à l'instauration du gna, reconnu à l'échelle internationale, dirigé par Fayez el-Sarraj, mais sans le soutien de Khalifa Haftar. En 2017, des pourparlers de paix se déroulent à Paris, mais en 2019-2020 des affrontements armés ont lieu entre le gna et les miliciens de l’Armée nationale libyenne (anl) de Khalifa Haftar.
Le 23 octobre 2020, l'entente pour un cessez-le-feu est conclue. Avec les élections du 5 février 2021, la Libye instaure un nouveau gouvernement intérimaire dirigé par Abdul Hamid Dbeibeh, appelé à guider le pays dans un chemin de transition jusqu'aux élections du 24 décembre 2021, qui met fin à la séparation entre les deux gouvernements. Mais à Tobrouk en mars 2022, un nouveau gouvernement parallèle, soutenu par la Russie, l'Egypte et les Emirats arabes unis est crée, avec Fathi Bashagha comme premier ministre et soutenu par Khalifa Haftar. Les tensions entre les différents partis politiques, les violences des milices, les échecs des médiations internationales et les ingérences des protagonistes étrangers compromettent le processus électoral: le vote est renvoyé sine die.
En août 2023 à Tripoli, des affrontements et des combats éclatent entre des miliciens de la «Brigade 444», un groupe armé actif dans la région occidentale et dirigé par Mahmoud Hamza et des miliciens des «Forces spéciales Rada» qui soutiennent le gna: 27 personnes meurent et plus de 100 sont blessées. Mais ce n'est qu'un des derniers — et nombreux — épisodes de violence désormais ordinaires, dans un pays où la corruption sévit, le trafic d'être humain prospère et l'instabilité créée par le djihadisme et les conflits du Sahel règnent. Les négociations internationales du Caire et de Genève sont aujourd'hui au point mort, et le spectre d'un retour de la guerre civile plane.
Le contrôle des puits de pétrole sont également au centre du conflit: la Libye possède la plus grande réserve de pétrole brut de tout le continent africain, avec 48 milliards de barils.
Roberto Paglialonga