En pèlerinage avec des détenus de la maison d’arrêt de Lyon-Corbas

Trouver un sens sur les chemins de Compostelle

 Trouver un sens  sur les chemins de Compostelle  FRA-016
20 avril 2023

Permettre à des détenus de la Maison d'arrêt de Lyon-Corbas de marcher entre Le Puy-en-Velay et Conques du 5 au 16 juin 2023 sur le chemin de Compostelle: tel est le projet à l’initiative de l’aumônerie catholique de la maison d’arrêt de Lyon-Corbas et soutenu par l'association diocésaine de Lyon. Les organisateurs précisent l’esprit dans lequel ce projet, réalisé depuis 2016, est mené: si le chemin emprunté est celui qui mène à Saint-Jacques-de-Compostelle, il ne s’agit pas d’un pèlerinage religieux. Pour autant cette voie n’a pas été choisie par hasard et l’expérience proposée est bien un pèlerinage au sens d’un travail sur soi, d’un voyage aussi intérieur, d’une expérience spirituelle respectueuse du point où chacun en est, de sa religion ou absence de religion.

En outre, c’est un chemin aisément praticable, qui n’exige pas que les participants soient de grands sportifs; c’est une des principales routes de l’histoire européenne, et qui permet la découverte de chefs d’œuvre culturels (dont le portail roman de l’abbaye de Conques, terme du voyage).

Elle permet une immersion dans la nature de personnes qui en sont privées depuis longtemps. Ce contact favorise une ressaisie de soi-même. C’est un itinéraire touristique aujourd’hui largement fréquenté. Il en résulte une certaine valorisation (mettre ses pas dans ceux de tout le monde; raconter ensuite aux familles un évènement que celles-ci pourront se représenter plus aisément que la vie carcérale).

De tout temps, ce chemin a été considéré par les hommes, qu’ils soient croyants ou non croyants, comme ayant à voir avec la question de la peine et de la justice. Il est la matérialisation d’un sens donné à la peine. Il s’agit de la première portion d’un des chemins de Saint-
Jacques. Le reste de la route pourrait un jour être effectué par leurs propres moyens avec leurs proches par les personnes anciennement détenues. Certains qui ont participé aux aventures précédentes en gardent le projet aujourd’hui.

Le choix a volontairement été de privilégier la durée pour ce projet (10 jours de marche) pour expérimenter vraiment ce que permet ce chemin, et sans voiture accompagnatrice. Nous n’avons que nos propres moyens et ce que nous portons pour rallier Conques depuis Le Puy. Cette fragilité (le contrat est que si l’un des marcheurs abandonne, tout le monde rentre à la prison) s’est avérée aussi une force l’an dernier: chacun est allé au bout de lui-même en endurance et en courage, une forte solidarité en est résulté dans le groupe.

C’est l’intuition que l’expérience d’une vie commune conviviale et solidaire, y compris dans l’effort, est de nature à éclairer tout homme quant à la juste manière de se rapporter aux autres, pendant ce type d’expérience, et au-delà.

Il s’agit d’offrir à des personnes détenues l’occasion de découvrir ou de retrouver des aptitudes inhibées par la vie carcérale et pourtant nécessaires pour donner du sens à la peine et préparer un projet de sortie.

«Je n’aurai plus peur de sortir après cette expérience» disait la première année un participant dont la conseillère pénitentiaire d’insertion et de probation constatait avec étonnement le changement à son retour. L’accent sera donc mis sur le vivre ensemble. La simplicité du dispositif vise à susciter l’entraide et une attention est portée à ce que chacun se sente investi de la responsabilité de l’ensemble du groupe (quant à la fatigue de l’un ou de l’autre, quant à la vaisselle, etc.).

Les six candidats à la permission de sortie préparatoire ont été sélectionnés parmi les détenus dont la situation pénale est compatible avec le projet: aménageables, pas encore sortis ni transférés sur un autre établissement. Six partiront retenus par le juge d’application des peines. Quant aux accompagnants, ce sont des aumôniers et depuis l’an dernier, un détenu ayant fait la marche en 2018 et qui est maintenant accompagnateur, beau fruit imprévu de cette aventure. Une diversité des âges permet de varier les approches et les discussions. Les temps de repos une fois arrivé au gîte sont l’occasion de temps de partage, de relecture, d’approfondissement spirituel en respectant le point où chacun en est, de visite du patrimoine. Le partenariat avec le Secours catholique peut permettre un accompagnement à la sortie des personnes qui ont fait la marche. Il s’agira de la septième édition de cette aventure hors norme.

Une campagne d’appel aux dons est lancée pour financer ce projet dont on peut trouver la présentation et les témoignages sur le lien suivant: https://www.credofunding.fr /fr/detenus-trouver-du-sens2023.

Ceux qui s’intéressent et soutiennent l’initiative pourront suivre cette marche sur le blog: https://detenustrouverdusens. over-blog.com/