FEMMES EGLISE MONDE

Les histoires
Trois femmes, un choix de vie

Nous sommes comboniennes

 Noi siamo comboniane  DCM-002
04 février 2023

La mission est la vie, c’est une rencontre qui transforme. Nous raconterons la mission à travers la vie de trois femmes consacrées à Dieu et engagées dans des pays qui sont le théâtre de conflits ou qui luttent pour les droits de la personne. Dans une Eglise souvent blessée et confuse, ces femmes partagent leurs rêves, leur travail de tous les jours, en partant de la passion pour le Christ qui change constamment leur existence, l’enrichit de nouvelles perspectives, l’ouvre à de nouvelles possibilités. Ce sont des religieuses comboniennes et depuis toujours, la vie missionnaire combonienne vise à témoigner du Christ dans le service à la vie, en particulier aux plus pauvres ; une invitation accueillie par de nombreuses jeunes femmes qui mettent en œuvre leur foi et elles-mêmes pour bâtir des ponts entre les cultures, tisser des relations de paix, défendre le cri de justice et de dignité qui provient d’hommes, de femmes, de peuples entiers. Et avec un regard attentif à l’aujourd’hui, entreprenant, ouvert à l’interculturalité, en travaillant et en se confrontant avec les autres.

Du Mexique au Moyen-Orient


Sœur Lourdes Garcia est mexicaine et au cours des cinq dernières années, elle a vécu au Moyen-Orient. Elle est actuellement en Israël et travaille auprès des communautés bédouines Jahalin dans le désert de Judée. De l’écoute de leurs besoins naissent des idées et des programmes de formation et d’éducation qui sont développés et réalisés à travers un réseau étroit de bénévoles et de collaborateurs de diverses fois religieuses, et de sœurs de diverses congrégations.

Comme elle le dit elle-même, « cela nous motive à sentir que nous sommes des ponts entre deux peuples, notre intention est en effet d’accompagner ce peuple minoritaire mais être, dans le même temps, des ponts de paix ». Ainsi, « on crée un petit réseau non seulement intercongrégationnel, voire interreligieux, pour sortir et rencontrer nos frères et sœurs plus vulnérables. J’ai beaucoup d’espoir que nous pouvons vivre et travailler ensemble pour un bien commun, en unissant les forces, en vivant chacun/e notre propre foi, juifs, musulmans, chrétiens ». Une foi qui est proclamée à travers des gestes et des actions quotidiennes, où les valeurs de l’Evangile deviennent réalité : l’accueil, le respect, la rencontre, la générosité. « Des liens de proximité, de dialogue, de fraternité et d’affection se sont créés avec nos frères et sœurs musulmans. En vivant ensemble les moments significatifs de leur vie, j’ai pu connaître non seulement leur culture et leurs traditions, mais la réalité intime de ces communautés, les difficultés, les problèmes des femmes, par exemple, qui se marient très jeunes et ne poursuivent pas d’études ni acquièrent une autre formation ».

L’engagement missionnaire continue également avec la petite communauté d’El-Azariyeh, la ville de Lazzaro, la zone palestinienne où elle vit. « Une petite communauté chrétienne d’environ 10 familles. Nous nous réunissons tous les jours pour réciter le Rosaire avec les femmes, nous organisons des moments de prière et nous rendons visite aux malades ».

Du Portugal au Soudan du Sud


Sœur Joana Carneiro vient du Portugal et vit et travaille depuis cinq ans comme médecin au St Daniel Comboni Catholic Hospital, de Wau, la deuxième ville du Soudan du Sud. Une circonscription d’environ 5.000 patients par semaine. Une réalité sanitaire importante dans un pays marqué par la guerre.

L’hôpital possède 110 lits divisés en quatre services : chirurgie, médecine générale, maternité et pédiatrie ; il y a en plus un service de radiologie qui est le plus avancé de Wau. Joana est actuellement responsable du service de chirurgie.

Elle raconte : « L’assistance sanitaire au Soudan du Sud est très fragile, au XXIe siècle, il y a encore de nombreuses personnes qui n’ont pas accès aux soins médicaux de base, et parmi elles, de nombreux enfants et femmes. Notre présence, en tant que sœurs missionnaires comboniennes, dans un hôpital diocésain, n’est pas simplement une solution pour le manque d’assistance sanitaire dans le pays, parce que cela est un droit fondamental auquel doivent pourvoir les structures sociales du pays. Notre présence est un rappel et un signe sacramentel : la société du Soudan du Sud, et du monde entier, ne peut oublier et abandonner les plus vulnérables d’entre eux. C’est la manifestation que l’amour de Dieu est présent, peu importante combien la situation peut être sombre et difficile ».

Quand Joanna est arrivée au Soudan du Sud, « ma première impression – a-t-elle raconté – a été un choc : je n’avais jamais vu tant de pauvreté matérielle. Un premier impact très fort, l’aéroport était fait de tentes, il n’y avait pas de structures. Quand je suis descendue de l’avion, j’ai marché sur la piste, j’ai vu ma valise sous une tente, on m’a mis un tampon et c’est tout. Un peuple très désorganisé, tout un pays sans eau ni électricité. Pas même dans les zones les plus pauvres où je m’étais rendue auparavant n’ai-je trouvé autant de pauvreté matérielle ».

« Donc – dit-elle aujourd’hui – mon rêve en tant que sœur missionnaire combonienne n’est pas seulement de fournir une aide pour les besoins médicaux des personnes, dans la mesure où cela est humainement possible, mais de suivre les traces de Jésus, qui allait « en faisant le bien ». Et en tant que sœur combonienne, je suis notre charisme pour développer de façon concrète l’apostolat et ma présence parmi les Sud-soudanais ». La méthode de Daniel Comboni est celle de sauver l’Afrique avec l’Afrique.

Du Tchad au Pérou


Certaines vont en mission en partant de terres qui sont depuis toujours des lieux de mission. Sœur Benjamine Kimala Nanga est une combonienne provenant du Tchad qui, après une période en Espagne où elle a étudié et travaillé dans la pastorale des migrants, des jeunes et de l’animation missionnaire, vit et travaille depuis six ans au Pérou. Elle s’y occupe de la prévention contre la traite de personnes et depuis environ un an, vit dans un quartier, le district du Carmen (Chincha Alta), qui est le berceau des afrodescendants péruviens.

Comme elle nous l’écrit elle-même : « je vis la mission comme un appel de Dieu qui marche avec son peuple, dans ce cas, avec le peuple péruvien dans ses diverses situations. La mission pour moi aujourd’hui est de marcher avec et au rythme des personnes qui nous accueillent dans leur réalité. Mon service missionnaire dans la prévention de la traite d’êtres humains m’a conduite à connaître les situations socio-politiques, économiques et ecclésiales du pays. Cet apprentissage m’a poussée à vivre ma présence missionnaire avec les pieds sur la terre péruvienne et le cœur plein d’espérance en Jésus Christ. La dimension du travail dans les commissions permanentes de la Conférence des religieux (gpic – Droits humains et Réseau Kawsay) du Pérou, avec le réseau Talitha Kum (inter-congrégationnel) ont été pour moi des espaces pour donner et recevoir ».

Kawsay, un terme quechua qui signifie vivre, est un réseau composé de plus de 38 congrégations religieuses et de prêtres diocésains.

Il n’existe pas de statistiques officielles, mais selon le bureau du défenseur civique, l’an dernier, environ cinq mille personnes ont disparu, dont 1.506 femmes adultes et 3.510 petites filles. En moyenne, 15 personnes disparaissent chaque jour, une toutes les deux heures. Selon la police, les disparitions sont liées à la violence de genre, au trafic d’êtres humains, aux traumatismes familiaux. Et il manque un système standardisé pour retrouver facilement les femmes disparues. Au cours du confinement, l’organisation pour les droits humains au Pérou a dénoncé surtout la disparition d’adolescentes fuyant une vie de violence qui sont enlevées ou qui finissent victimes de la traite.

La mission vécue par ces jeunes femmes qui se sont mises en chemin en partant de diverses régions du monde, sont allées vers d’autres terres, d’autres peuples et d’autres cultures, est un parcours de transformation personnelle outre que d’évangélisation. Pour cela, Lourdes peut dire : « vivre ici au Moyen-Orient a enrichi mon identité de missionnaire. J’ai beaucoup appris des diverses cultures et religions de cette terre, cela a un effet positif sur la façon d’exprimer ma foi ».

C’est un chemin qui transforme la façon dont on se sent membre de l’Eglise. Joana nous dit : « Je ne peux être une femme consacrée qu’en faisant partie de l’Eglise, comme communauté de croyants, comme “cénacle d’apôtres”. Etre ici, au Soudan du Sud, m’appelle à marcher ensemble, à ne pas chercher un rythme différent, plus lent ou plus rapide, mais celui de l’Eglise concrète qui vit, s’incarne et célèbre la vie même de Jésus Christ ».

Tout cela exige une nouvelle façon d’être des consacrées missionnaires, une méthodologie qui, comme l’affirme Benjamine, « voit le centre dans l’Evangile comme plénitude de vie, écologie intégrale dans le langage d’aujourd’hui. Il est important que nous continuions à évangéliser et à nous laisser évangéliser par les périphéries existentielles, par les nouvelles voies d’évangélisation, pour combattre l’injustice et l’exploitation des personnes à la racine, en particulier à travers la prévention. C’est un travail transversal par rapport à tout ce que nous faisons et vivons ; cela signifie prendre soin de la vie dans sa totalité ». Et elle conclut : « je continuerai d’apprendre et de partager ma fonction de missionnaire combonienne africaine ici aussi, au Pérou avec les afrodescendants, fils et filles des esclaves arrachés à l’Afrique ».

 Gabriella Bottani et Mariolina Cattaneo
Sœurs missionnaires comboniennes