François poursuit les catéchèses sur le discernement

Comment connaître les «mots de passe» du cœur

 Comment connaître les «mots de passe» du cœur  FRA-040
06 octobre 2022

Chers frères et sœurs, bonjour!

Nous poursuivons notre réflexion sur le thème du discernement. La dernière fois nous avons considéré la prière comme son élément indispensable, con-sidérée comme familiarité et confiance en Dieu. La prière, non pas comme les perroquets. Non: la prière comme familiarité et confiance en Dieu; la prière des enfants à leur Père; la prière avec le cœur ouvert. Cela nous l’avons vu dans la dernière catéchèse. Aujourd’hui, je voudrais, de manière presque complémentaire, souligner qu’un bon discernement demande aussi la connaissance de soi-même. Se connaître soi-même. Et ce n’est pas facile. En effet, le discernement implique nos facultés humaines: la mémoire, l’intellect, la volonté, l’affectivité. Souvent, nous ne savons pas discerner parce que nous ne nous connaissons pas suffisamment et nous ne savons pas non plus ce que nous voulons vraiment. Vous avez souvent entendu: «Mais cette personne, pourquoi n’ordonne-t-elle pas sa vie? Jamais elle n’a su ce qu’elle voulait...». Sans arriver à cet extrême, il nous arrive également à nous de ne pas bien savoir ce que nous voulons, nous ne nous connaissons pas bien.

Les doutes spirituels et les crises de vocation sont souvent sous-tendus par un dialogue insuffisant entre la vie religieuse et notre dimension humaine, cognitive et affective. Un auteur de spiritualité notait combien beaucoup de difficultés sur le sujet du discernement renvoient à des problèmes d’une autre nature, qui doivent être reconnus et explorés. Cet auteur écrit: «J’en suis venu à la conviction que le plus grand obstacle au véritable discernement (et à une réelle croissance dans la prière) n’est pas la nature intangible de Dieu, mais le fait que nous ne nous connaissons pas suffisamment, et que nous ne voulons même pas nous connaître tels que nous sommes vraiment. Nous nous cachons presque tous derrière un masque, non seulement devant les autres, mais aussi lorsque nous nous regardons dans le miroir » (Th. Green, Le bon grain et l’ivraie, Rome, 1992, 25). Nous avons tous la tentation d’être masqués, même face à nous-mêmes.

L’oubli de la présence de Dieu dans notre vie va de pair avec l’ignorance sur nous-mêmes — ignorer Dieu et nous ignorer —, l’ignorance des caractéristiques de notre personnalité et de nos désirs les plus profonds.

Se connaître soi-même n’est pas difficile, mais c’est fatigant: cela implique un patient travail d’introspection. Cela requiert la capacité de s’arrêter, de «désactiver le pilote automatique», pour prendre conscience de notre façon de faire, des sentiments qui nous habitent, des pensées récurrentes qui nous conditionnent et souvent à notre insu. Cela exige également que nous fassions la distinction entre les émotions et les facultés spirituelles. «Je sens» n’est pas la même chose que «Je suis convaincu»; «Je me sens de» n’est pas la même chose que «Je veux». C’est ain-si qu’il est possible de se rendre compte à quel point la vision que nous avons de nous-mêmes et de la réalité est parfois erronée. S’en rendre compte est une grâce! En effet, il arrive souvent que des croyances erronées sur la réalité, basées sur les expériences du passé, nous influencent fortement, limitant notre liberté de miser sur ce qui compte vraiment dans notre vie.

En vivant à l’ère des technologies de l’information, nous savons combien il est important de connaître le mot de passe pour accéder aux programmes où se trouvent les informations les plus personnelles et les plus précieuses. Mais la vie spirituelle a aussi ses mots de passe: il y a des mots qui touchent le cœur parce qu’ils font référence à ce à quoi nous sommes le plus sensibles. Le tentateur, c’est-à-dire le diable, connaît bien ces mots-clés, et il est important que nous les connaissions aussi, pour ne pas nous retrouver là où nous ne voulons pas être. La tentation ne suggère pas nécessairement de mauvaises choses, mais souvent des choses désordonnées, présentées avec une importance excessive. De cette manière il nous hypnotise à travers l’attraction que ces choses suscitent en nous, des choses belles mais illusoires, qui ne peuvent pas tenir leurs promesses, et ainsi nous laissent à la fin avec un sentiment de vide et de tristesse. Ce sentiment de vide et de tristesse est le signe que nous avons «pris» une voie qui n’était pas la bonne, qui nous a désorientés. Il peut s’agir, par exemple, du diplôme, de la carrière, des relations, toutes choses en soi louables, mais envers lesquelles, si nous ne sommes pas libres, nous risquons de nourrir des attentes irréelles, comme par exemple la confirmation de notre valeur. Toi, par exemple, quand tu penses à des études que tu entreprends, y penses-tu seulement pour te promouvoir toi-même, pour ton propre intérêt, ou aussi pour servir la communauté? Là, on peut voir quelle est l’intentionnalité de chacun d’entre nous. Les plus grandes souffrances proviennent souvent de ce malentendu, car aucune de ces choses ne peut être la garantie de notre di-gnité.

Pour cela, chers frères et sœurs, il est important de nous connaitre, de se connaître, de connaître les mots de passe de notre cœur, ce à quoi nous sommes le plus sensibles, pour nous protéger de qui se présente avec des mots persuasifs pour nous manipuler, mais aussi de reconnaître ce qui est vraiment important pour nous, en le distinguant des modes du moment ou des slogans tape-à-l’œil et superficiels. Souvent, ce qui est dit dans un programme à la télévision, dans certaines publicités, nous touche le cœur et nous fait emprunter cette direction sans liberté. Faites attention à cela: suis-je libre ou est-ce que je me laisse aller aux sentiments du moment, ou aux provocations du moment?

Une aide à cet égard est l’examen de conscience, mais je ne parle pas de l’examen de conscience que nous faisons tous lorsque nous allons nous confesser, non. C’est-à-dire: «Mais j’ai péché en ceci, cela...» Non. Examen de conscience général de la journée: que s’est-il passé dans mon cœur aujourd’hui? «Tant de choses se sont passées...». Lesquelles? Pourquoi? Quelles traces ont-elles laissées dans le cœur? Faire un examen de conscience, c’est-à-dire la bonne habitude de relire dans le calme ce qui se passe dans notre journée, en apprenant à noter dans nos évaluations et nos choix ce à quoi nous accordons le plus d’importance, ce que nous cherchons et pourquoi, et ce que finalement nous avons trouvé. Et surtout, en apprenant à reconnaître ce qui rassasie mon cœur. Car seul le Seigneur peut nous donner la confirmation de ce que nous valons. Il nous le dit chaque jour de la croix: il est mort pour nous, pour nous montrer combien nous sommes précieux à ses yeux. Aucun obstacle ou échec ne peut empêcher sa tendre étreinte. L’examen de conscience aide beaucoup, parce que nous voyons alors que notre cœur n’est pas une route où tout passe à notre insu. Non. Voir: Que s’est-il passé aujourd’hui? Qu’est-ce qui est advenu? Qu’est-ce qui m’a fait réagir? Qu’est-ce qui m’a rendu triste? Qu’est-ce qui m’a rendu joyeux? Qu’est-ce qui était mauvais et si j’ai fait du mal aux autres. Il s’agit de voir le parcours des sentiments, des attractions dans mon cœur durant la journée. N’oubliez pas! L’autre jour, nous avons parlé de la prière; aujourd’hui, nous parlons de la connaissance de soi-même.

La prière et la connaissance de soi-même nous permettent de grandir dans la liberté. Il s’agit de grandir dans la liberté! Ce sont des éléments fondamentaux de l’existence chrétienne, des éléments précieux pour trouver sa place dans la vie. Merci.

A l’issue de l’audience générale, le Pape a rappelé la tragédie que vit actuellement l’Ukraine, lors du salut aux pèlerins italiens:

Et n’oublions pas de prier pour l’Ukraine martyrisée, en demandant sans cesse le don de la paix au Seigneur.

Parmi les pèlerins qui assistaient à l’audience générale du 5 octobre, se trouvaient les groupes francophones suivants:

De France: Groupe de pèlerins du diocèse de Metz; collège Saint-Joseph, de Romilly- sur-Seine.

Je salue cordialement les pèlerins de langue française en particulier les fidèles du diocèse de Metz et les jeunes du Collège Saint Joseph.

Frères et sœurs, en ce mois de prière pour les missions, apprenons à cultiver des moments de silence et de rencontre avec le Seigneur afin qu’il nous inspire les voies et moyens pour être toujours fidèles à notre vocation de disciples missionnaires. Que Dieu vous bénisse !