Le cardinal-secrétaire d’Etat intervient à l’assemblée générale de l’onu

Pour un avenir sous le signe de la sécurité et de la paix

Vatican's Secretary of State Cardinal Pietro Parolin addresses the 77th Session of the United ...
29 septembre 2022

C’est par une invitation à œuvrer ensemble pour une paix qui naît du dialogue que s’est conclue l’intervention prononcée par le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’Etat, le 24 septembre lors du débat général de la Semaine de haut-niveau, en ouverture de la 77e session de l’assemblée générale des Nations unies. Un appel qui arrive après avoir passé en revue les maux d’un monde touché par la pandémie, dans lequel les conflits armés ont atteint «un degré sans précédent depuis 1945, avec environ deux milliards de personnes qui vivent dans des régions touchées par un conflit et des millions de personnes déplacées de force».

Le cardinal a souligné également la tendance de certains Etats à imposer des politiques controversées en matière de droits humains qui, au contraire, «continuent d’être universels, objectifs et solidement ancrés dans la dignité divine de la personne humaine donnée par Dieu». Des droits comme celui «à la vie, à la liberté de pensée, de conscience, de religion, d’opinion et d’expression». En rappelant ensuite que le nombre de personnes souffrant de la faim dans le monde a atteint 828 millions en 2021, le cardinal Parolin affirme qu’il est temps de mettre fin à l’«hypocrisie de l’armement», de «parler de paix» et de ne pas vivre d’armes. Il a invité en revanche à investir dans l’éducation, «vecteur primaire d’un développement humain intégral».

«Il est impératif — a affirmé le secrétaire d’Etat — que l’on retrouve au plus tôt un large accord et un authentique consensus au sein de cette Organisation, si elle veut retrouver sa crédibilité internationale en tant que véritable famille des nations». Ce processus, a-t-il ajouté, «devrait s’étendre au-delà de l’assemblée générale, à la réforme des organes ayant une capacité exécutive effective, tels que le Conseil de sécurité». Le cardinal a souligné également que les membres permanents en particulier ont une responsabilité cruciale pour le maintien de la paix et de l’ordre dans le monde: «Quand il manque une vision ou une volonté politique commune pour la coexistence pacifique et que les gardiens eux-mêmes de la paix ignorent les règles qu’ils affirment soutenir, ils commettent eux-mêmes de graves injustices. Guidé par un intérêt personnel démesuré et déterminé par la logique du pouvoir, le système est fortement lésé et mis en danger». D’où l’appel à placer le bien commun au-delà des intérêts partisans en vue d’«un avenir sûr et heureux».

La pensée du cardinal est allée ensuite vers l’Ukraine, avec la guerre qui «a exacerbé des tendances mondiales déjà préoccupantes, parmi lesquelles la hausse des prix des denrées alimentaires et du carburant et l’augmentation des déplacements». «Le conflit — a affirmé le cardinal Parolin — a conduit également à une attention renouvelée à la sécurité nucléaire et au risque d’une escalade nucléaire, un thème qui, pendant des décennies, est resté largement en dehors de la conscience publique». L’attention s’est portée sur les pauvres «qui seront placés face à un choix existentiel entre se chauffer ou manger». Une action concertée et urgente est nécessaire parce que «la guerre en Ukraine non seulement mine le régime de non-prolifération nucléaire, mais nous place également face au danger d’une catastrophe nucléaire provoquée par une escalade ou un accident».

«Le spectacle d’un Etat doté d’armes nucléaires en guerre contre un Etat qui a renoncé à son arsenal nucléaire en échange de garanties de sécurité, qui ont été ignorées sans vergogne, découragera les autres Etats dotés d'armes nucléaires de suivre son exemple, ce qui compliquera la voie vers un monde sans armes nucléaires», a affirmé le secrétaire d’Etat. «Toute menace d’utilisation des armes nucléaires — souligne-t-il — est répugnante et mérite une condamnation sans équivoque».

Considérant la «plus grande crise de réfugiés européens depuis la seconde guerre mondiale», causée précisément par le conflit en Ukraine, le cardinal Parolin rappelle qu’elle «ne fait que s’ajouter aux millions de personnes en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie qui ont été contraintes de fuir leur pays d’origine en raison de conflits et de guerres, à la recherche d’un avenir meilleur pour elles-mêmes et leurs familles». Un thème qui relance la question de la protection des réfugiés, un système qui exigerait «un effort sincère» de réactualisation.

«Le Saint-Siège — a affirmé le cardinal — ne cesse de suivre avec préoccupation la question palestinienne et le conflit qu’elle engendre, et souhaite exprimer sa proximité avec le peuple palestinien pour les souffrances causées par l’assassinat de la journaliste Shireen Abu Akleh lors du conflit armé entre l’armée israélienne et certains Palestiniens le 11 mai à Jénine (Palestine), que la journaliste ne faisait que documenter». Il a également exprimé la préoccupation pour les tensions survenues lors des funérailles.

En ce qui concerne le Liban, il est à espérer que «le pays, notamment avec les élections présidentielles imminentes, poursuive le chemin de la renaissance, tout en restant fidèle à sa vocation d’être une terre de paix». Pour le Yémen, a été exprimée la satisfaction pour le cessez-le-feu atteint grâce à la médiation de l’onu et renouvelé, avec le souhait que «ce signe d’espérance constitue un pas définitif vers la fin du conflit sanglant qui a entraîné l’une des pires crises humanitaires au monde». Un monde plus sûr passe également par la reprise des négociations à Vienne sur l’accord sur le nucléaire iranien. L’inquiétude en revanche a été exprimée en ce qui concerne l’impasse en Libye, où le pays continue d’être divisé, et la «détérioration de la situation humanitaire et en matière de sécurité dans la région du Sahel, qui continue d’être la cible de groupes terroristes, et l’expansion de cette violence vers l’Afrique de l'Ouest».

Le cardinal Parolin a parlé également de la République démocratique du Congo, de l’Ethiopie, de l’attention aux transitions politiques au Soudan, au Tchad, au Mali, au Burkina Faso et en Guinée. Il n’a pas caché l’aggravation de la situation au Sud Soudan à cause des inondations et de l’insécurité alimentaire qui frappent surtout les enfants: «Le Saint-Siège, tout en continuant de suivre de près la situation dans le pays le plus jeune, continue de promouvoir la réconciliation à travers le dialogue et la coopération sociale». Un chemin pacifique et respectueux a été souhaité pour le Nicaragua mais aussi pour Haïti, frappé par la violence et accablé par les conditions économiques et sociales précaires. Enfin, le Saint-Siège se dit attristé par les conflits en Azerbaïdjan et en Arménie, et exhorte les parties au respect du cessez-le-feu. Il a exprimé sa satisfaction, en revanche, pour le vaccin contre la malaria, principale cause de mort en Afrique, qui doit être accessible à tous.

En outre, face aux «effets négatifs de l’impact défavorable du changement climatique», qui continue d’affecter gravement «notre maison commune», le secrétaire d’Etat a dénoncé la possibilité de tomber dans «un état d’indifférence mondialisée». Et considérant la Cop27, la Conférence des parties sur les changements climatiques organisée par les Nations unies et en programme à Sharm El Sheikh, en Egypte, du 7 au 18 novembre prochain, le cardinal Parolin a souhaité qu’«il y ait la volonté politique d’adopter des décisions plus fermes et transformatrices pour protéger l’environnement en accélérant l’action mondiale pour le climat». Enfin, le cardinal a souligné les richesses et les dangers du monde numérique, en particulier en ce qui concerne la traite des êtres humains, la diffusion de la haine et de l’extrémisme et a répété l’engagement du Saint-Siège au sein du Comité ad hoc pour l’élaboration d’une convention internationale mondiale visant à combattre l’utilisation des technologies à des fins criminelles et pour affronter le problème de la criminalité transnationale». «Non — a donc conclu le secrétaire d’Etat — à un monde divisé entre puissances en conflit; oui à un monde uni entre peuples et civilisations qui se respectent».

Benedetta Capelli