Un pèlerinage pénitentiel

«Pèlerinage pénitentiel», comme il l’a lui-même défini, le voyage imminent du Pape François au Canada a été présenté le 20 juillet à la salle de presse du Saint-Siège. Le directeur, Matteo Bruni, a illustré le programme de la trente-septième visite internationale, la première depuis que s’est aggravé le problème au genou du Pape, qui depuis le dimanche 24 et ce jusqu’au 30 juillet, se trouve de l’autre côté de l’Atlantique pour rencontrer en particulier les trois populations originaires de l’immense pays d’Amérique du Nord — Premières nations, Inuits et Métis — et pour «marcher ensemble» avec elles sur le chemin de la réconciliation et de la guérison, comme le dit la devise choisie par les organisateurs.

Et si les «First Nations» représentent la communauté prédominante d’autochtones dans la partie sud du territoire canadien, les Inuits font partie de l’un des groupes principaux qui habitent la zone arctique; les Métis situés dans la partie plus occidentale du pays, sont les métis descendant de l’union entre autochtones et européens.

Un voyage composé de divers temps de rencontre personnelle pour réitérer la «proximité» du Pape Bergoglio à ces communautés, comme réponse concrète aux dialogues qui se sont déroulés au Vatican fin mars et début avril de cette année, qui ont eu comme toile de fonds le long processus de vérité et de réconciliation sur les épisodes dramatiques des plus de 150.000 enfants autochtones contraints de fréquenter les «pensionnats» confiés par le gouvernement, avec peu de ressources financières, à des Eglises chrétiennes (catholique, protestante et anglicane), dans le contexte d’assimilation forcée promue pendant plus d’un siècle par l’Etat canadien entre 1870 et 1996, quand le dernier pensionnat fut fermé.

Et c’est précisément pour ne pas perdre la mémoire du «déracinement imposé aux populations autochtones et des blessures qui leur ont été infligées» que le Successeur de Pierre s’est rendu au Canada, en s’arrêtant dans les territoires du diocèse d’Edmonton, de l’archidiocèse de Québec et du diocèse reculé de Churchill - Baie d’Hudson proche du Cercle polaire arctique. Neuf interventions, entre discours et homélies, que le Pape François prononce en espagnol au cours de cette semaine de visite. Deux Messes auront lieu, la première dans un stade à Edmonton le 26, fête des saints Joachim et Anne, parents de la bienheureuse Vierge Marie, avec une intention particulière pour les grands-parents; et la seconde au sanctuaire national de Sainte- Anne de Beaupré, au Québec, le 28, «pour la réconciliation».

La visite annoncée pour la première fois en octobre l’an dernier, et dont les intentions ont été répétées au cours des rencontres au Vatican de mars et avril, et confirmée officiellement en mai, est donc «un pèlerinage qui se poursuit, dans divers lieux du pays, choisi précisément dans cette perspective», c’est-à-dire celle de l’écoute des populations autochtones. Et il a comme toile de fonds également un thème cher qui unit les préoccupations du Pape et de ces peuples la sauvegarde de la création.

Le logo même de la visite est l’œuvre d’un artiste aborigène, Shaun Vincent, dont le processus créatif est inspiré par la nature, en particulier celle des terres de sa communauté Métis du Manitoba. Il est représenté par un cercle contenant des symboles stylisés, dont la forme évoque les éléments du cycle vital — soleil, terre et eau — à l’intérieur duquel sont représentés des troupeaux de caribous et de bisons, des bancs de poissons, des aigles, la colombe de la paix et les clés de saint Pierre.

Le voyage dans la «mosaïque culturelle canadienne» est le deuxième voyage de cette année 2022 pour François, après la visite à Malte au début du mois d’avril, la visite prévue début juillet au Soudan du Sud et en République démocratique du Congo ayant été renvoyée à une date ultérieure précisément en raison des difficultés de déambulation du Pape. Malheureusement, le voyage au Canada a lieu lui aussi alors que l’Europe et le monde continuent d’assister impuissants au conflit en Ukraine, et les immigrés de cette population martyrisée sont parmi les communautés les plus nombreuses du Canada. Le Pape Bergoglio revient sur le continent américain après trois ans et demi: la dernière fois avait été en janvier 2019 pour la Journée mondiale de la jeunesse (jmj) de Panama. Depuis qu’il a été élu sur le siège de Pierre, le Pape a visité le Brésil, pour la jmj de Rio de Janeiro (2013), l’Equateur, la Bolivie et le Paraguay (2015), Cuba et les Etats-Unis d’Amérique (2015), le Mexique (2016), la Colombie (2017), le Chili et le Pérou (2018).

Avant lui, Jean-Paul ii s’est rendu au Canada en 1984, du 9 au 20 septembre, pendant douze jours, visitant pas moins de quatorze villes, dont Québec et Edmonton; en 1987, le 20 septembre, quand il a célébré la Messe sur l’île de Fort Simpson pour les peuples autochtones, annulée au cours du voyage précédent en raison du brouillard; et en 2002, du 23 au 29 juillet, pour la jmj de Toronto. Lui aussi a accompli des gestes et prononcé des paroles qui ont retenti comme une ouverture à la revendication des droits des autochtones.