Témoignage sur le cardinal Gantin à cent ans de sa naissance

Témoignage sur le cardinal Gantin

 Témoignage sur le cardinal Gantin  FRA-020
17 mai 2022

En ce mois de mai est célébré le centenaire de la naissance du cardinal Bernardin Gantin, qui a eu lieu le 8 mai 1922 à Toffo, dans ce qui était alors le Dahomey.

Le cardinal Gantin est le premier évêque africain ayant été appelé à occuper de hautes responsabilités au sein de la Curie romaine et il fait partie de la première génération de prêtres africains élevés à l’épiscopat à notre époque, loin des inoubliables évêques nés en Afrique aux cours des premiers siècles du christianisme, et parmi lesquels ressortent saint Augustin et saint Cyprien.

Formé au séminaire de Saint-Gall de Ouidah (Bénin), il fut ordonné prêtre en 1951 ici, à Rome, alors qu’il fréquentait l’université pontificale du Latran. En 1956, à 34 ans seulement, il fut nommé évêque, huit mois avant que le Dahomey devienne un Etat indépendant sous le nom de Bénin.

Le 5 février 1960, il fut nommé archevêque métropolitain de Cotonou et immédiatement après, il devint président de la conférence épiscopale d’Afrique occidentale francophone (Cerao).

Il fut l’un des plus jeunes évêques, avec Mgr Karol Wojtyła, à participer aux quatre sessions du Concile Vatican ii.

En 1971, le Pape Paul vi l’appela à Rome comme secrétaire-adjoint de la Congrégation de Propaganda Fide et, deux ans plus tard, comme secrétaire. Il fut ensuite brièvement président de la Commission justice et paix et du Conseil pontifical Cor Unum. Lors du consistoire de 1977, le Pape Montini le créa cardinal. Sa mère, qui vint à Rome à cette occasion, lui dit en le saluant avant de repartir pour le Bénin: «Même si tu es cardinal maintenant, n’oublie pas le village lointain dont nous provenons».

Le Pape Jean-Paul ii le nomma en 1984 préfet de la Congrégation pour les évêques et dans le même temps président de la Commission pontificale pour l’Amérique latine, charge qu’il occupa pendant 14 ans.

Il fut doyen du Collège cardinalice pendant dix ans et lorsqu’il eut 80 ans, il présenta sa démission pour retourner parmi son peuple, au Bénin, où il reprit son activité d’évangélisation qu’il avait commencée le jour de son ordination sacerdotale et que, bien que sous des formes différentes, il n’avait jamais interrompue.

Le départ de Rome du cardinal Gantin fut pour un grand nombre de ses amis italiens et pour moi, qui avais collaboré avec lui et qui étais ensuite devenu préfet du dicastère qu’il avait dirigé pendant 14 ans, une séparation douloureuse, mais nous avons tous apprécié la noble inspiration qui le poussait: il voulait retourner là où il avait commencé son ministère sacerdotal et épiscopal pour consacrer la dernière période de sa vie à son pays d’origine. Il le fit car il en sentait le désir dans son cœur, mais surtout pour être utile à la croissance dans le Christ de la population du bien-aimé Bénin, où il avait été archevêque au début de son ministère. Ce fut une décision cohérente avec toute l’orientation de sa vie et avec la sollicitude de son cœur de pasteur.

Né au mois de mai, il termina ses jours sur terre le même mois, le 13 mai 2008, à l’âge de 86 ans, dont 31 passés au sein de la Curie romaine.

Avec le cardinal Francis Arinze, j’ai présidé ses funérailles à Cotonou au nom du Pape Benoît xvi qui me confia cette charge. Etant donné l’immense foule qui désirait participer et les dimensions réduites de la cathédrale, la Messe des obsèques eut lieu dans le stade de Cotonou, en présence d’une soixantaine d’évêques, provenant de divers pays surtout africains, du président de la République avec tous les ministres du gouvernement du Bénin, de nombreux prêtres, religieux et religieuses et d’une foule extraordinairement nombreuse de fidèles.

Au terme de la Messe des ob-sèques, le président de la République prit la parole pour rappeler la figure du cardinal Gantin et termina en annonçant que, à partir de ce jour, l’aéroport de la capitale aurait porté le nom «Cardinal Bernardin Gantin».

A ses dons de leader calme et serein, le cardinal Gantin unissait une grande noblesse de caractère et une amabilité naturelle qui suscitait la fraternité et la communion; il se distinguait surtout par une profonde spiritualité et un esprit paternel marqué.

En parlant de lui, le Pape Benoît xvi dit que la personnalité humaine et sacerdotale du cardinal Gantin constituait une synthèse merveilleuse des caractéristique de l’âme africaine et de celles propres à l’esprit chrétien, unissant l’identité africaine et les valeurs évangéliques.

Un aspect qui m’a toujours frappé chez le cardinal Bernardin Gantin est le sens missionnaire qui l’animait: je l’ai très souvent entendu parler de l’urgence et de l’importance de l’œuvre missionnaire. Je l’ai souvent entendu manifester sa gratitude pour le travail accompli par les missionnaires européens en Afrique. Il se considérait également comme un fruit de l’œuvre des missionnaires. Un fruit mûr, dirais-je, parce que, outre la simplicité de ses manières, le cardinal Gantin avait une foi robuste et un intense amour de Dieu, de l’Eglise et du Pape.

Sa dévotion à la Vierge était édifiante. Il regrettait d’ailleurs qu’il n’y eut pas au Bénin un véritable sanctuaire marial, bien que la dévotion ait été apportée sur cette terre par les missionnaires portugais dès la seconde moitié du xviie siècle, suivis en 1861 par les missionnaires franciscains. Il étudia tous les moyens d’y remédier et trouva de généreuses collaborations en Afrique et en Europe. Les deux contributions les plus importantes qu’il reçut provinrent du Pape Jean-Paul ii et de la conférence épiscopale italienne. Le 4 octobre 1998, il posa la première pierre pour la construction du sanctuaire Notre-Dame d’Arigbo au pied de la colline de Dassa-Zoumé, sur la route qui, de Cotonou, conduit au nord du pays. Plus de trois mille fidèles parti-cipèrent à la célébration solennelle, accompagnés par tous les évêques des dix diocèses du Bénin. Quatre ans plus tard, le sanctuaire était achevé jusque dans sa décoration. Le cardinal s’y rendit à plusieurs reprises pour prier et célébrer la -Messe.

A l’initiative du doyen du Collège cardinalice — auteur de ce témoignage — et des préfets de la Congrégation pour les évêques et de celle pour l’évangélisation des peuples, vendredi 20 mai, à 8h30, sera célébrée à l’autel de la Chaire de la basilique Saint-Pierre, une Messe solennelle en mémoire du cardinal Bernardin Gantin, à l’occasion du centenaire de sa naissance.

Giovanni Battista Re