Lettre du Pape à l’occasion de la xxv e séance publique des Académies pontificales

Redécouvrir le message de foi des antiques communautés chrétiennes

 Redécouvrir le message de foi des antiques communautés chrétiennes  FRA-007
15 février 2022

A l’occasion de la xxv e séance publique des Académies pontificales, réalisée cette année par l’Académie pontificale romaine d’archéologie et par l’Académie pontificale Cultorum Martyrum, le 1er février, le Pape François a envoyé au cardinal Gianfranco Ravasi, président du Conseil pontifical de la culture et du Conseil de coordination entre Académies pontificales, le message que nous publions ci-dessous.

A mon cher frère cardinal
Gianfranco Ravasi
Président du Conseil pontifical de la culture
et du Conseil de coordination
entre les Académies pontificales

La xxve séance publique des Académies pontificales, dont le temps fort sera la remise du Prix annuel attribué à d’éminents chercheurs, est désormais imminente. Cette rencontre, reportée l’année dernière en raison de la pandémie, se renouvelle maintenant en dépit des difficultés qui demeurent. En effet, elle est fondamentale pour le dialogue entre les Académies et pour la reconnaissance donnée aux jeunes talents qui se distinguent dans leurs domaines culturels et thématiques respectifs.

Cette xxve édition est organisée par l’Académie pontificale romaine d’archéologie et par l’Académie pontificale Cultorum Martyrum qui, à l’occasion du bicentenaire de la naissance du grand archéologue Giovanni Battista de Rossi, ont voulu la lui con-sacrer de façon opportune.

Giovanni Battista de Rossi est considéré comme le fondateur de l’archéologie chrétienne moderne. En effet, son contemporain, Theodor Mommsen, affirmait qu’il «avait élevé cette discipline de simple passe-temps d’érudits à véritable science historique».

L’activité de Giovanni Battista de Rossi fut fortement encouragée par le bienheureux Pie ix qui, le 6 janvier 1852, institua la Commission d’archéologie sacrée «pour une protection et une surveillance plus efficaces des cimetières et des anciens édifices chrétiens de Rome et de sa périphérie, pour les fouilles et les explorations scientifiques de ces cimetières et pour la conservation et la sauvegarde de tout ce qui était retrouvé ou mis en évidence au cours des fouilles». L’archéologue romain fut également cher à Léon xiii qui voulut l’accueillir au palais apostolique de Castel Gandolfo pendant la dernière période de sa vie.

Le soutien du Pape se traduisit également dans l’achat par le Saint-Siège de plusieurs terrains surplombant les catacombes les plus importantes, afin de préserver de toute construction ces témoignages fondamentaux du christianisme de la première heure auxquels Giovanni Battista de Rossi a consacré ses études et ses fouilles.

C’est ainsi que fut redécouvert, au milieu du dix-neuvième siècle, le plus ancien cimetière de Saint-Calixte où furent identifiées la crypte des Papes, du iiie siècle, et celle de sainte Cécile, rapprochant ainsi les spécialistes et les fidèles des témoignages archéologiques et, à travers eux, de la foi ferme et fervente de ces anciennes communautés chrétiennes.

Grâce aux études comparatives des sources documentaires et des mémoires archéologiques, Giovanni Battista de Rossi découvrit de nombreuses tombes de martyrs romains et, avec des collaborateurs et de jeunes chercheurs, il relança le culte de ces martyrs. Les tombes des martyrs et leurs mémoires représentent les centres d’intérêt privilégiés du grand archéologue romain, qui jeta les bases d’une discipline vivante et prête à saisir le message provenant des catacombes chrétiennes, comprises comme lieux du repos provisoire dans l’attente de la résurrection. Il perçut et fit ressortir la signification profonde de ces nécropoles souterraines, cons-tellées de milliers de niches funéraires identiques, comme pour exprimer de façon plastique la fraternité et l’égalité entre tous les membres de l’Eglise.

Les pèlerinages qui se développent encore aujourd’hui dans de nombreuses galeries de catacombes découvertes et étudiées par Giovanni Battista de Rossi, retracent les itinéraires des fidèles des premiers siècles qui, avec émotion, se rendaient sur les tombes des martyrs afin de toucher ces simples pierres tombales et laisser, à travers tous les graffitis encore lisibles aujourd’hui, une invocation, une supplication, un signe de dévotion.

Nous admirons l’extraordinaire engagement de Giovanni Battista de Rossi, chercheur infatigable, qui jeta les bases d’une discipline scientifique, l’archéologie chrétienne, présente aujourd’hui encore dans de nombreuses universités; et nous nous souvenons également de la passion avec laquelle il vivait ce qui était pour lui une véritable vocation: découvrir et faire connaître toujours mieux la vie des premières communautés chrétiennes de Rome, à travers toutes les sources possibles, à commencer précisément par les sources archéologiques et épigraphiques.

Son exemple mérite d’être à nouveau proposé afin de promouvoir et de développer les études d’archéologie chrétienne, non seulement parmi les spécialistes, mais également dans les universités et les instituts où sont enseignées la théologie et l’histoire du christianisme.

C’est pourquoi, voulant encourager les personnes qui, avec beaucoup d’engagement et d’enthousiasme, se consacrent aux études archéologiques et aux études historiques et hagiographiques, sur les pas de Giovanni Battista de Rossi, je suis heureux de remettre la médaille d’or du pontificat à la recherche intitulée «The Machaerus Archaeological Excavations» («Les fouilles archéologiques de Macheronte»), dirigée par le professeur Gyözö Vörös, membre de la Hungarian Academy of Arts, dont les résultats sont rassemblés dans trois volumes monumentaux sur la forteresse jordanienne dominant la Mer Morte.

En signe d’encouragement pour les études archéologiques sur les monuments paléo-chrétiens, je décerne, ex æquo, la Médaille d’argent du pontificat à M. Domenico Benoci, pour sa thèse sur «Les inscriptions chrétiennes de la Zone i de Saint-Calixte» et à M. Gabriele Castiglia, pour la monographie intitulée «Topographie chrétienne du centre-sud de la Toscane».

En souhaitant à tous les académiciens et aux participants à la xxve séance publique un engagement toujours plus fécond afin de promouvoir l’humanisme chrétien, j’invoque la protection maternelle de Marie, Reine des martyrs, afin qu’elle vous accompagne toujours dans votre itinéraire humain et académique, et je vous donne de tout cœur, ainsi qu’à vos proches, la bénédiction apostolique.

Du Vatican, le 1er février 2022