· Cité du Vatican ·

Editorial

Les artisans de paix

 Les artisans de paix  FRA-010
02 septembre 2025

Charles de Pechpeyrou

«Pourquoi est-ce que des enfants souffrent, meurent de faim, voient leurs parents mourir? Pourquoi est-ce qu’il y a des guerres?». Les enfants ont le don de poser les questions vitales de manière directe et de nous faire prendre conscience de la vanité de nos raisonnements. La guerre est un enfer et rien ne pourra édulcorer cela. Alors comment parler de paix en évitant l’indécence des grands mots face à la chair martyrisée, aux esprits que l’on veut briser par la torture?

Quand tout s’effondre, ne restent que les paroles de vérité de ceux qui connaissent la guerre. Le jeune pasteur Dietrich Bonhoeffer, exécuté en 1945, écrivait depuis sa cellule: «Il est plus “intelligent” d’être pessimiste, car on évite les déceptions et on ne se compromet pas devant les hommes. Ainsi l’optimisme est-il interdit aux “intelligents”. Dans son essence, il n’est pas une manière de voir la situation présente, mais il est une force vitale, une force de l’espoir (…) Il y a un autre optimisme, stupide et lâche, qui doit être évité. Mais que personne ne méprise l’optimisme en tant que volonté d’avenir, même s’il se trompe cent fois».

Quand tout s’effondre, il faut écouter le témoignage de ceux qu’un simple geste d’humanité posé par un autre être humain, une main tendue, a sauvés du désespoir. En temps de guerre, il n’existe pas de petit geste de paix car chaque parole, chaque acte juste est une goutte précieuse de contrepoison au milieu du chaos.

Dans l’homélie qu’il a prononcée le jour de l’Assomption, le cardinal Pierbattista Pizzaballa, patriarche de Jérusalem des Latins, a ces mots intenses: «Dans ce contexte de mort et de destruction, nous voulons continuer à avoir confiance, à nous allier aux nombreuses personnes qui ont encore le courage de désirer le bien, et créer avec elles des contextes de guérison et de vie. Le mal continuera à s’exprimer, mais nous serons le lieu, la présence que le dragon ne peut vaincre: la graine de vie, précisément. (…) Nous savons que tôt ou tard, le dragon sera vaincu. Mais nous savons qu’il faut pour le moment endurer, sachant que le dragon continuera à sévir dans l’histoire. Et le sang causé par tout ce mal, le sang “de ceux qui gardent le témoignage de Jésus” (Ap 12,17), et de tout autre innocent, non seulement ici en Terre Sainte, à Gaza comme partout ailleurs dans le monde, n’est pas oublié. Il n’est pas jeté dans un coin de l’histoire. Nous croyons, au contraire, que ce sang coule sous l’autel, mêlé au sang de l’Agneau, participant lui aussi à l’œuvre de rédemption à laquelle nous sommes associés. C’est là que nous devons être. C’est là notre place, notre refuge dans le désert».

Quand tout s’effondre, il reste la promesse du Christ: Heureux les artisans de paix, ils seront appelés fils de Dieu.