
Jeannette Zurita
Avoir rencontré personnellement le Pape François le 16 janvier 2018 à la prison pour femmes de Santiago du Chili a été un rêve, une chose que je pensais ne jamais pouvoir réaliser dans ma vie. Comment aurais-je pu imaginer que moi, une femme qui avait commis de graves erreurs, méprisée et sans valeur pour la société, je me serais retrouvée face à face avec le Saint-Père? Plus émouvant encore fut de voir avec combien d’attention il écoutait mes paroles, qui étaient également les paroles de milliers de femmes privées de liberté, invisibles au reste du monde. Pendant des mois, je m’étais préparée à ce moment, pleine d’espérance, imaginant comment cela se passerait, et, au final, les émotions ont dépassé les attentes.
Au terme de la rencontre, au cours de laquelle le Pape nous a rappelé que nous étions «privées de liberté et non de dignité», nous nous sommes embrassées et nous avons pleuré pendant longtemps avec sœur Nelly Léon, la religieuse qui a consacré sa vie à cette prison à travers la fondation Mujer Lévantate. Grâce à ce dialogue public avec François, j’ai cessé de me sentir méprisée!
Depuis lors, ma façon de voir les choses, de donner de la valeur à ce que j’ai, de comprendre ce que signifie se repentir avec tout le cœur des erreurs commises, a changé encore plus. Aujourd’hui encore, j’éprouve un grand sens de responsabilité envers moi-même et les autres pour avoir eu le privilège de parler au Souverain Pontife. Je crois que Dieu m’a mis à cet endroit pour une raison, parce qu’Il agit sur toute chose et a une mission pour moi. Je ressens le besoin de porter mon témoignage à quiconque souhaite l’écouter, car Dieu a opéré un changement en moi et je le vis comme une chose très puissante dans mon cœur. Avoir rencontré le Pape a marqué ma vie pour toujours, et je ne veux pas décevoir ceux qui ont cru en moi. Tout cela a eu un grand impact, non seulement sur moi mais également sur ma famille, qui est très fière que j’aie rencontré le Pape et que j’aie racheté ma liberté. Aujourd’hui, je sens que mon cœur est en paix et ce que m’a dit François ce jour-là résonne encore en moi: «Tu es courageuse, tu es courageuse…». Et depuis, je pense vraiment que je le suis! Aujourd’hui, je vis avec mon fils, qui a 17 ans, et j’ai fini mes études universitaires, je suis cosméticienne-esthéticienne professionnelle. Je travaille dans un spa dans un quartier aisé de Santiago du Chili et je suis très heureuse de mener une vie normale.
J’ai suivi avec une grande appréhension l’hospitalisation du Pape, j’étais toujours en attente de nouvelles sur sa santé. Sa disparition m’a beaucoup attristée, et j’ai rêvé de lui souvent, mais maintenant je sens qu’il m’accompagne toujours, qu’il est à mes côtés.