· Cité du Vatican ·

La revue de théologie fête son demi-siècle d’existence

«Communio»: 50 ans de fidélité

 «Communio»: 50 ans de fidélité  FRA-007
03 juin 2025

Denis Dupont-Fauville (Depuis Paris)

Membre du Comité de Rédaction de «Communio» France

Mercredi 14 mai, 15 heures, Notre-Dame de Paris. La foule, dense comme à l’accoutumée, se fait plus silencieuse en constatant la présence d’une assemblée nombreuse dans la nef. Une cérémonie à cette heure? Certes: une vingtaine de célébrants s’avancent, précédant l’archevêque de Paris, Mgr Laurent Ulrich, pour une messe d’actions de grâces à l’occasion des 50 ans de l’édition française de la revue Communio. La solennité le dispute à la cordialité, avec une nuance d’étonnement devant le parcours considérable accompli.

Toute la journée, les interventions se succèdent. Outre la riche homélie de Mgr Eric de Moulins-Beaufort, président sortant de la Conférence des évêques de France et membre du Comité de rédaction, la réflexion se développera essentiellement au Collège des Bernardins, depuis la projection d’un film documentaire jusqu’à des tables rondes où les grands anciens (Olivier Boulnois, Jean-Luc Marion) se mêlent à des générations plus jeunes (Christophe Bourgeois, Emilie Tardivel) et même à des conférenciers «extérieurs» à la revue (Adrien Candiard, François Huguenin1).

Fondée sur une intuition de Hans Urs von Balthasar, désireux après Vatican II de partir des textes du Concile plutôt que de prétendre prolonger son esprit en disant autre chose, Communio revêtit d’emblée la forme paradoxale d’un titre unique pour des éditions nationales diverses, échangeant entre elles pour honorer chaque année quelques thématiques communes, de manière à manifester la richesse de la pluralité ecclésiale dans le socle d’une communion partagée.

L’édition française débutera en 1975, trois ans après l’Allemagne et l’Italie (suivies des Etats-Unis, de la Yougoslavie…). Avec l’appui du père Daniélou, puis du père de Lubac et du père Bouyer, la tâche de concrétiser le projet échoit finalement à un groupe de jeunes laïcs, normaliens regroupés autour de l’adoration eucharistique à Montmartre.

Malgré les apparences, Communio ne se veut pas une revue de théologie à proprement parler, mais une publication qui manifeste comment notre expérience du Christ peut transformer notre expérience du monde. Ce qui implique beaucoup de travail pour que le dialogue assumé, au sein d’une culture en constante évolution, porte des fruits toujours nouveaux et savoureux. Les numéros parus en témoignent, de même que la vivacité des débats et le constant renouvellement de la rédaction.

Comme l’écrivait Joseph Ratzinger dans la revue en 1993, «la communion des hommes entre eux n’est possible qu’à partir de Dieu, qui, par le Christ, rassemble les hommes dans l’Esprit Saint, afin qu’ils forment une communauté — l’Eglise au sens propre du terme». Cette journée l’a illustré, mêlant dans un amphithéâtre comble les fondateurs2 et plusieurs générations de chrétiens passionnés. Comme le concluait avec humour le philosophe Jean-Luc Marion à la fin de la soirée, la situation du catholicisme est paradoxale: avant Vatican II les choses allaient bien mais il n’inspirait aucune confiance, alors qu’aujourd’hui les choses vont mal et il est source de confiance. Parole d’espérance, au cœur de ce jubilé-anniversaire.

1Liste non exhaustive.

2Marion avait ainsi dédicacé ses Prolégomènes de la charité (1986) à «JR Bradurion», acronyme des quatre piliers originels, tous présents le 14 mai: J.-R. Armogathe, R. Brague, J. Duchesne, J.-L. Marion.