
Andrea Monda
«Il est important d’écouter: nous devons nous rendre compte que les enfants observent, comprennent et se souviennent. Et par leurs regards et leurs silences, ils nous parlent. Ecoutons-les!». C’est par cet appel que le Pape a conclu son discours lors du Sommet mondial sur les droits des enfants, appel qui été repris dans les paroles de remerciement prononcées dans l’après-midi, auquel il a ajouté: «Le père Faltas a prononcé une parole, une phrase que j’aime beaucoup: “Les enfants nous regardent”. C’est également le titre d’un film connu. Les enfants nous regardent: ils nous regardent pour voir comment nous allons de l’avant dans la vie». François fait référence au film de Vittorio De Sica sorti en 1943 intitulé justement Les enfants nous regardent, qui révèle une vérité simple mais grande: ils nous regardent, ils nous observent. Et comme ce qu’écrivait Flannery O’Connor est vrai, que «les hommes deviennent ce qu’ils voient», le spectacle de la vie que les adultes sont capables de monter devant les yeux de leurs enfants joue un rôle fondamental dans la vie de ces derniers. D’où le thème de la grande responsabilité qui pèse sur les épaules des parents. Il faut ajouter qu’au fur et à mesure que l’homme grandit, il découvre que la surprise est toujours tout près et que ce que l’on pensait jusqu’à très récemment doit être continuellement remis en question et souvent renversé. Ce «renversement» indique que la caractéristique de la vie est sa paradoxalité. L’ensemble de l’humanité, en poursuivant son chemin dans ce lieu étrange que l’on appelle monde, a compris le paradoxe qui se cache dans le thème de l’enfance, à savoir que ceux qui semblent «mineurs» sont les véritables «majeurs», que les enfants ne sont pas les «petits» mais les véritables «grands», qu’ils ne sont pas les plus faibles mais les plus forts, qu’ils ne sont pas les moins importants mais les plus précieux, en définitive que «les derniers seront les premiers». Et également, ce qui sonne encore plus scandaleux est le fait que les enfants seraient les plus intelligents. C’est du moins ce que pensait Alexandre Dumas fils en déclarant sévèrement: «Comment se fait-il que les enfants étant si intelligents, la plupart des hommes soient bêtes? Cela doit tenir à l’éducation».
Sans aucun doute, le grand tournant de l’histoire de l’humanité, celui qui a saisi le paradoxe de la condition enfantine, a eu lieu avec l’avènement du christianisme et avec ce Dieu fait enfant qui pleure dans la froideur d’une grotte -choyé par sa jeune mère. Cet enfant qui, une fois devenu adulte et maître, a proposé au monde des adultes précisément les enfants comme modèle pour pouvoir entrer dans la vie pleine, dans le royaume des cieux, au point d’exclamer toute sa joie dans le célèbre hymne de jubilation parce que le Père a «caché cela aux sages et aux intelligents et l’a révélé aux tout-petits» (Mt 11, 25). Et cela accroît encore plus le niveau de la responsabilité du monde des adultes à l’égard des enfants qui nous regardent.