· Cité du Vatican ·

FEMMES EGLISE MONDE

Vie et littérature

Un drame conjugal et une sentence révolutionnaire

 Un dramma coniugale e una sentenza rivoluzionaria  DCM-010
31 octobre 2024

Une femme tombe amoureuse d’un homme jeune, beau et riche. Elle s’enfuit avec lui, l’épouse, devient la mère de ses quatre enfants et continue à l’aimer, bien qu’il se révèle différent et violent dès les premiers jours du mariage. Vingt ans plus tard, alors qu’elle parvient à se séparer, elle le tue lors d’une dernière rencontre et fait disparaître son corps. Elle n’avoue pas immédiatement, elle le fait après la découverte du cadavre.
Le roman de Maria Grazia Calandrone, « Magnifico e tremendo stava l’amore » (Einaudi, 2024), est basé sur un fait criminel. Il raconte une histoire vraie, un drame conjugal qui, en Italie, a fait l’objet d’un procès qui s’est terminé par une sentence avant-gardiste et révolutionnaire : l’acquittement pour légitime défense.
La protagoniste du livre est Luciana, une belle jeune fille de bonne famille, qui avait 17 ans en 1983 lorsqu’elle a rencontré Domenico, un jeune homme de 23 ans à l’histoire familiale particulière, lors de vacances au bord de la mer en Calabre et qui en avait 38 lorsqu’en janvier 2004, à Rome, elle l’a tué de douze coups de couteau au plus fort d’une violente dispute, puis a jeté son corps dans le Tibre avec l’aide de son nouveau compagnon. Entre les deux, une vie de coups, d’humiliations, de menaces. D’obsessions.

Elle ne subit pas toujours en silence. Quand c’est trop, elle dénonce son mari et s’enfuit parfois avec les enfants. Mais elle revient ensuite. Ce sont des choix qui semblent incompréhensibles, selon des jugements hâtifs et rétrospectivement, mais il faut dire que nous sommes dans les années 90, le problème de la violence domestique n’est pas vécu avec l’intensité d’aujourd’hui. En Italie, il n’existe même pas encore de loi sur le harcèlement. Et Luciana continue pourtant d’aimer ce garçon pour lequel elle a interrompu ses études, qui s’est révélé autoritaire, possessif, infidèle.
Le tribunal qui l’acquitte avec une formule complète prend en considération non seulement l’acte lui-même, le meurtre, mais aussi les abus subis et reconnaît que Luciana tue par désespoir. Lors de la dernière rencontre, Domenico a tenté de l'étrangler, elle s’est défendue pour ne pas mourir. Son compagnon est également acquitté.

Ce n’est pas la première fois que Maria Grazia Calandrone écrit sur la violence domestique. Dans son livre « Dove non mi hai portata » (Einaudi, 2022, finaliste du Premio Strega), elle reconstitue l’histoire de Lucia, sa mère biologique, qui a fui un mari violent qu’elle avait été forcée d’épouser. Lucia tente une nouvelle existence avec un autre homme, Giuseppe. Amoureux, ils s’enfuient de Molise à Milan, mais les difficultés les rattrapent. Selon la loi de l’époque, elle est coupable de graves délits : une relation adultère et l’abandon du toit conjugal. En 1965, Lucia et Giuseppe se laissent mourir dans le Tibre à Rome et abandonnent leur fille de huit mois, l’auteur du livre, dans le parc de la Villa Borghese, espérant que quelqu’un s’occupera d'elle.