«La foi et la science peuvent s'unir dans la charité si la science est mise au service des hommes et des femmes de notre temps, et non déformée à leur détriment, voire à leur destruction». C'est ce qu'a déclaré le Pape François aux participants à la deuxième conférence de l'Observatoire astronomique du Vatican en mémoire de Georges Lemaître, qui s'est tenue à Castel Gandolfo du 16 au 21 juin sur le thème «Trous noirs, ondes gravitationnelles et singularités spatio-temporelles». Le Souverain Pontife a reçu les astronomes dans la matinée du jeudi 20 juin dans la salle Clémentine et leur a adressé le discours suivant:
Chers scientifiques, frères et sœurs, bonjour!
Je salue Son Eminence le cardinal Vérgez, je salue la religieuse «vice-gouverneur». Les femmes commencent à commander ici! [rires]
Je vous souhaite une cordiale bienvenue et vous remercie pour cette visite appréciée. Je remercie en particulier le frère Guy Consolmagno et les autres membres de la communauté de l'Observatoire astronomique du Vatican pour cette initiative.
Vous vous êtes réunis à Castel Gandolfo pour la conférence «Trous noirs, ondes gravitationnelles et singularités spatio-temporelles», organisée en l'honneur de Mgr George Lemaître, sept ans après la précédente. Entre-temps, la valeur scientifique du prêtre et cosmologue belge a été reconnue par l'Union astronomique internationale, qui a décidé que la célèbre loi de Hubble devrait plutôt s'appeler loi de Hubble-Lemaître.
Ces jours-ci, vous discutez des dernières questions soulevées par la recherche scientifique en cosmologie: les différents résultats obtenus dans la mesure de la constante de Hubble, la nature énigmatique des singularités cosmologiques (du big-bang aux trous noirs) et le sujet très actuel des ondes gravitationnelles.
L'Eglise est attentive à ces recherches et les promeut, car elles secouent la sensibilité et l'intelligence des hommes et des femmes de notre temps. Le début de l'univers, son évolution ultime, la structure profonde de l'espace et du temps confrontent l'être humain à une recherche anxieuse de sens, dans un vaste scénario où il risque de se perdre. Cela nous fait redécouvrir la pertinence des paroles du psalmiste: «A voir ton ciel, ouvrage de tes doigts, / la lune et les étoiles, que tu -fixas, / qu'est donc le mortel, que tu t'en souviennes, / le fils d'Adam, que tu le veuilles visiter? / A peine le fis-tu moindre qu'un dieu; / tu le couronnes de gloire et de beauté» (Ps 8, 4-7). Il est donc évident que ces thèmes sont particulièrement pertinents pour la théologie, la philosophie, la science et la vie spirituelle.
Georges Lemaître était un prêtre et un scientifique exemplaire. Son chemin humain et spirituel représente un modèle de vie dont nous pouvons tous nous inspirer.
Pour satisfaire la volonté de son père, il a fait des études d'ingénieur; il a été enrôlé dans la Première Guerre mondiale et en a connu les horreurs. A l'âge adulte, il suit sa vocation sacerdotale et scientifique. Au départ, il est — comme on dit — un «concordiste», c'est-à-dire qu'il croit que les vérités scientifiques se trouvent, de manière voilée, dans les Saintes Ecritures. Ses expériences humaines et ses élaborations spirituelles qui en résultent l'amènent ensuite à comprendre que la science et la foi suivent deux voies différentes et parallèles, entre lesquelles il n'y a pas de conflit. Au contraire, ces chemins peuvent s'harmoniser entre eux, car la science et la foi, pour un croyant, ont la même matrice dans la Vérité absolue de Dieu. Son chemin de foi le conduit à prendre -conscience que la création et le big-bang sont deux réalités distinctes, et que le Dieu auquel il croit n'est pas un objet l'on peut facilement catégorisé par la raison humaine, mais qu'il est le «Dieu caché», qui reste toujours dans une dimension de mystère, pas totalement compréhensible.
Chers amis, je vous souhaite de continuer à discuter dans un esprit loyal et humble des sujets que vous abordez. Que la liberté et l'absence de conditionnement, dont vous faites l'expérience dans cette conférence, vous aident à progresser dans vos domaines vers la Vérité, qui est assurément une émanation de la Charité de Dieu. La foi et la science peuvent s'unir dans la charité si la science est mise au service des hommes et des femmes de notre temps, et non déformée à leur détriment, voire à leur destruction. Je vous encourage à aller aux périphéries du savoir humain: c'est là que nous pouvons faire l'expérience du Dieu Amour, qui satisfait et étanche la soif de nos cœurs.
Je vous bénis tous de tout cœur, ainsi que votre travail. Et je vous demande de prier pour moi. Merci.