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Jamais autant de guerres

Kenyan soldiers from the East African Community regional force (EAC-RF) hold AK assault rifles as ...
13 juin 2024

Il n'y a jamais eu autant de guerres dans le monde qu'aujourd'hui. L’Institut de recherche sur la paix d’Oslo (Prio), dans son dernier rapport publié le 10 juin, propose un panorama approfondi de cette «troisième guerre mondiale par morceaux» sur laquelle le Pape François a souvent essayé de sensibiliser les dirigeants politiques et l'opinion publique internationale.

L'année 2023 est l'année qui a connu le plus grand nombre de conflits depuis 1946: pas moins de 59 répartis dans 34 pays. Selon le rapport du Prio, les trois dernières années ont été les plus meurtrières depuis la fin de la Guerre froide. Trois guerres ont particulièrement contribué à cette donnée dramatique: celle dans la région du Tigré, dans le nord de l'Ethiopie, celle en Ukraine et celle à Gaza. La guerre dans la région du Tigré a causé 286.000 morts en 2021-2022. Les morts ont été si nombreux que, après le traité de paix de novembre 2022, le nombre de morts liés aux conflits dans le monde a globalement baissé en 2023, malgré les 71.000 morts en Ukraine (rien que l'année dernière) et les 23.000 morts en moins de trois mois après le déclenchement du conflit entre Israël et Hamas à Gaza.

L'année 2024 s'annonce aussi particulièrement meurtrière, étant donné qu'aucun accord n'a été trouvé pour ces deux guerres désastreuses, tout comme un autre conflit grave, celui qui a éclaté au Soudan en avril 2023 et qui continue d'ensanglanter l'Afrique. C'est précisément ce continent qui détient le plus grand nombre de conflits se déroulant à l'échelle nationale, pas moins de 28, suivi de l'Asie avec 17, du Moyen-Orient avec 10, de l'Europe avec 3 et des Amériques avec 1 (en Colombie). Le nombre de conflits en Afrique a presque doublé par rapport à il y a dix ans et 330.000 morts liés à la guerre ont été enregistrés au cours des trois dernières années. Parmi ces conflits figurent celui lié aux violences perpétrées par Boko Haram au Nigeria et celui qui sévit en République démocratique du Congo. En Asie, il y a le conflit entre la junte militaire au pouvoir et les rebelles en Birmanie et celui sur l'île philippine de Mindanao. «La hausse des conflits étatiques peut être en partie attribuée à l'expansion de l'Etat islamique en Asie, en Afrique et au Moyen-Orient, ainsi qu'à la participation croissante d'acteurs non étatiques, comme le groupe Jama’at Nusrat al-Islam wal-Muslimin» dans le Sahel et en Afrique occidentale, affirme Siri Aas Rustad, chercheuse au Prio et principale auteure du rapport. «Cette situation fait qu'il est de plus en plus difficile pour les agences humanitaires et les organisations de la société civile de naviguer dans le paysage des conflits et d'améliorer les conditions de vie de la population», souligne l'auteure du rapport.

En ce qui concerne les conflits non étatiques, c'est-à-dire ceux où le gouvernement n'est pas directement impliqué, le plus grand nombre se trouve en Amérique latine, où le rapport signale une hausse de la violence, par exemple au Mexique et au Brésil.

Pour finir, le Moyen-Orient présente des données contrastées. Pour la première fois depuis 2015, le conflit au Yémen n'est plus catégorisé comme conflit et une baisse de la violence a été observée en Syrie. En revanche, la progressive diminution du nombre de conflits dans les régions a cessé, passant ainsi de 8 à 10 conflits entre 2022 et 2023. En 2022, le Moyen-Orient a enregistré un peu plus de 5.000 morts liés aux combats, le chiffre le plus bas depuis 2011. Toutefois, l'année dernière, le nombre a de nouveau augmenté, atteignant 26.000 morts environ, dont 23.000 à Gaza. «Les données concernant le Moyen-Orient laissent espérer que la violence extrême et les conflits complexes comme ceux en Syrie puissent diminuer — conclut l'auteure du rapport. Cependant, il est préoccupant que de nouveaux conflits extrêmement violents émergent de plus en plus souvent». (valerio palombaro)