· Cité du Vatican ·

Audience générale du 17 avril
François poursuit ses réflexions sur les vertus en parlant de la tempérance

La juste mesure
pour dominer les instincts
et les passions

 La juste mesure pour dominer  les instincts et les passions  FRA-016
18 avril 2024

Chers frères et sœurs, bonjour!

Aujourd’hui, je parlerai de la qua-trième et dernière vertu cardinale: la tempérance. Avec les trois autres, cette vertu partage une histoire qui remonte très loin dans le temps et qui n’est pas l’apanage des seuls chrétiens. Pour les Grecs, la pratique des vertus avait comme objectif le bonheur. Le philosophe Aristote a écrit son plus important traité d’éthique en l’adressant à son fils Nicomaque pour l’instruire sur l’art de vivre. Pourquoi tout le monde recherche-t-il le bonheur et si peu y parviennent? Voilà la question. Pour y répondre, Aristote aborde le thème des vertus, parmi lesquelles l’enkráteia, c’est-à-dire la tempérance, occupe une place de choix. Le terme grec signifie littéralement «pouvoir sur soi-même». La tempérance est un pouvoir sur soi-même. Cette vertu est donc la capacité de se dominer soi-même, l’art de ne pas se laisser envahir par des passions rebelles, de mettre de l’ordre dans ce que Manzoni appelle le -«fouillis du cœur humain».

Le Catéchisme de l’Eglise catholique nous dit que «la tempérance est la vertu morale qui modère l’attrait des plaisirs et procure l’équilibre dans l’usage des biens créés». Et il poursuit, «Elle assure la maîtrise de la volonté sur les instincts et maintient les désirs dans les limites de l’honnêteté. La personne tempérante oriente vers le bien ses appétits sensibles, garde une saine discrétion et ne se laisse pas entraîner pour suivre les passions de son cœur» (n. 1809).

Ainsi, la tempérance, comme le dit le mot lui-même, est la vertu de la juste mesure. Dans toutes les situations, on se comporte avec sagesse, car les personnes qui agissent toujours sous le coup de l’impulsion ou de l’exubérance ne sont finalement pas fiables. Les personnes sans tempérance ne sont jamais fiables. Dans un monde où tant de gens se vantent de dire ce qu’ils pensent, le tempérant préfère au contraire penser ce qu’il dit. Comprenez-vous la différence? Ne pas dire ce qui me vient à l’esprit, comme ça... Non, penser à ce que je dois dire. Il ne fait pas de promesses en l’air, mais prend des engagements dans la mesure où il peut les tenir.

Même avec les plaisirs, la personne tempérante agit avec discernement. Le libre cours des pulsions et la licence totale accordée aux plaisirs finissent par se retourner contre nous-mêmes, nous plongeant dans l’ennui. Combien de personnes qui ont voulu tout essayer avec voracité se sont retrouvées à perdre le goût de toute chose! Mieux vaut alors rechercher la juste mesure: par exemple, pour apprécier un bon vin, mieux vaut le savourer par petites gorgées que de l’avaler d’un trait. Nous savons tous cela.

La personne tempérante sait bien peser et doser les paroles. Elle pense à ce qu’elle dit. Elle ne laisse pas un moment de colère ruiner des relations et des amitiés qui ne se reconstruiront que difficilement par la suite. En particulier dans la vie de famille, où les inhibitions sont réduites, nous courons tous le risque de ne pas maîtriser les tensions, les irritations et la colère. Il y a un temps pour parler et un temps pour se taire, mais dans les deux cas, il faut savoir garder la mesure. Et cela vaut pour beaucoup de choses, par exemple être avec d’autres et rester seul.

Si la personne tempérante sait maîtriser son tempérament, cela ne veut pas dire qu’on la verra toujours avec un visage paisible et souriant. En effet, il est parfois nécessaire de s’indigner, mais toujours avec la juste mesure. Voilà les termes: la juste mesure, la juste mesure. Une parole de reproche est parfois plus salutaire qu’un silence aigre et rancunier. La personne tempérante sait que rien n’est plus désagréable que de corriger l’autre, mais elle sait aussi que c’est nécessaire: sinon, on donnerait libre cours au mal. Dans certains cas, la personne tempérante parvient à tenir ensemble les extrêmes: elle affirme des principes absolus, revendique des valeurs non négociables, mais sait aussi comprendre les gens et faire preuve d’empathie à leur égard. Elle fait preuve d’empathie.

Le don de la personne tempérante est donc l’équilibre, une qualité aussi précieuse que rare. Tout, en effet, dans notre monde, pousse à l’excès. Au contraire, la tempérance se marie bien avec des attitudes évangéliques telles que la petitesse, la discrétion, la vie cachée, la douceur. Qui est tempérant apprécie l’estime des autres, mais n’en fait pas le seul critère de chacun de ses actes et de chacune de ses paroles. Il est sensible, il sait pleurer et n’en a pas honte, mais il ne pleure pas sur lui-même. Vaincu, il se relève; victorieux, il est capable de retourner à la vie cachée de toujours. Il ne cherche pas les applaudissements, mais sait qu’il a besoin des autres.

Frères et sœurs, il n’est pas vrai que la tempérance rend maussade et sans joie. Au contraire, elle permet de mieux savourer les biens de la vie: être ensemble à table, la tendresse de certaines amitiés, la confiance des personnes sages, l’émerveillement devant les beautés de la création. Le bonheur dans la tempérance est une joie qui s’épanouit dans le cœur de ceux qui reconnaissent et valorisent ce qui compte le plus dans la vie. Prions le Seigneur pour qu’il nous donne ce don: le don de la maturité, de la maturité de l’âge, de la maturité affective, de la maturité sociale. Le don de la tempérance.

A l’issue de l’audience, le Pape a lancé les appels suivants:

Notre pensée, notre pensée à tous, va en ce moment aux populations en guerre. Pensons à la Terre Sainte, à la Palestine, à Israël. Pensons à l’Ukraine, l’Ukraine martyrisée. Pensons aux prisonniers de guerre: que le Seigneur suscite la volonté de les libérer tous. Et en parlant des prisonniers, je pense à ceux qui sont torturés. La torture des prisonniers est une chose horrible, elle n’est pas humaine. Pen-sons à toutes ces tortures qui blessent la dignité de la personne, et aux nombreux torturés. Que le Seigneur nous aide tous et nous bénisse tous.

Parmi les pèlerins qui assistaient à l’audience générale, se trouvaient les groupes francophones suivants:

De France: Groupe de pèlerins du diocèse de Tours, avec Mgr Vincent Jordy; groupe de pèlerins du diocèse de Clermont-Ferrand; groupe de la pastorale des jeunes du diocèse de Dijon; paroisse Notre-Dame-de-Moulins, de Moulins; paroisse Sainte-Bernadette, de Montpellier; paroisse Saint-Pierre, de Chatuzange-Le-Goubet; les paroisses de Saint-Esprit de la Rhune; Saint-Pierre de Nive-Adour; Saint-Michel Garicoïts du Labourd; paroisse Saint-Laurent, de Paris; paroisse les Clochers du Pont de Caylus; paroisse Saint-Jean-Baptiste, de Grenelle; servants d’autel des paroisses de Montigny-Voisins et Elancourt-Maurepas; Institut de l’Alma, de Paris; lycée Notre-Dame de Sion, de Marseille; lycée catholique de Pontlevoy; lycée Chevreul, de Saint-Didier; collège Saint-Laud, d’Angers; cours Saint-Charles, d’Orléans; école de charité et de mission, de Gex, et de Rambouillet.

Je salue cordialement les personnes de langue française, particulièrement les pèlerins provenant des paroisses et des établissements scolaires de France.

Apprenons à cultiver la vertu de la tempérance pour savoir contrôler nos paroles et nos actes, afin d’éviter des situations de conflits inutiles, et promouvoir la paix dans notre société. Que Dieu vous bénisse!