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Présentation du livre «Life. Mon histoire dans l’Histoire» écrit avec Fabio Marchese Ragona

François: je n’envisage pas de démission

 François: je n’envisage pas de démission  FRA-012
21 mars 2024

Intitulée «Life. Mon histoire dans l'Histoire», l’autobiographie tant attendue du Pape sera publiée en Amérique et en Europe aux éditions HarperCollins. François l'a écrite avec Fabio Marchese Ragona, vaticaniste du groupe italien Mediaset et également ami du Souverain Pontife. Elle retrace les 87 années de la vie de Jorge Mario Bergoglio, entrelacées avec les grands événements de l'histoire, allant de son départ avec ses parents du Piémont vers l’Argentine, à la pandémie du covid-19.

Le Pape François raconte en premier lieu le rôle fondamental joué dans son éducation par sa grand-mère paternelle, nonna Rosa. «Mes grands-parents parlaient le (dialecte, ndlr) piémontais, c'est pourquoi le piémontais a été ma première langue maternelle».

En octobre 1927, la grand-mère
Rosa et le grand-père Giovanni, avec leur fils Mario — le père du Pape — devaient partir pour l'Argentine depuis le port de Gênes, sur le bateau Principessa Mafalda. Mais le grand-père n'a pas pu réunir à temps l'argent nécessaire à l'achat des billets et a dû reporter le voyage. Le Principessa Mafalda a coulé au large des côtes brésiliennes et trois cents émigrants se sont noyés. Les Bergoglio partent alors en février 1929, avec le Giulio Cesare. «Deux semaines plus tard, ils arrivent en Argentine et sont accueillis à l'Hotel de inmigrantes, un centre d'accueil pour migrants qui n'est pas très différent de ceux dont nous entendons parler aujourd'hui».

Esther a marqué le parcours estudiantin du jeune Jorge Mario Bergoglio, qui se souvient aujourd’hui de l’enseignante comme «une femme formidable, à qui je dois beaucoup. C'était une vraie communiste, athée mais respectueuse: même si elle avait ses propres idées, elle n'a jamais attaqué la foi. Et elle m'a beaucoup appris sur la politique: elle me donnait des publications à lire, dont celle du parti communiste Nuestra Palabra... Quelqu'un, après mon élection comme Pape, a dit que je parlais souvent des pauvres parce que je serais moi aussi un communiste ou un marxiste. Mais parler des pauvres ne signifie pas automatiquement être communiste: les pauvres sont la bannière de l'Evangile et sont dans le cœur de
Jésus! Dans les communautés chrétiennes, les gens partageaient les biens: ce n'est pas du communisme, c'est du pur christianisme!».

«Pendant cette année au séminaire, j'ai également eu un petit béguin: c'est normal, sinon nous ne serions pas des êtres humains. J'avais déjà eu une petite amie, une fille très gentille qui travaillait dans l'industrie cinématographique et qui s'est ensuite mariée et a eu des enfants. Cette fois, j'étais au mariage d'un de mes oncles et j'ai été ébloui par une fille. Elle m'a fait tourner la tête par sa beauté et son intelligence. Pendant une semaine, j'ai eu son image en tête et j'ai eu du mal à prier! Heureusement, cela a passé et je me suis consacré corps et âme à ma vocation».

Jorge Mario Bergoglio a caché et protégé trois séminaristes liés à Mgr Angelelli, plus tard assassiné par la dictature. «Ces trois séminaristes m'ont aidé à accueillir d'autres jeunes en danger comme eux, au moins vingt en deux ans. Ils m'ont parlé d'un garçon qui devait s'échapper d'Argentine: j'ai remarqué qu'il me ressemblait et j'ai réussi à le faire s'échapper habillé en prêtre et avec ma carte d'identité. Cette fois-là, j'ai risqué gros: s'ils l'avaient découvert, ils l'auraient sans doute tué, et ensuite ils seraient venus me chercher». Quant aux deux jésuites expulsés de la compagnie et enlevés par le régime, le père Yorio et le père Jalics, Jorge Mario Bergoglio raconte qu'il s'est battu pour leur libération: il est allé à deux reprises voir l'amiral Emilio Eduardo Massera; il a réussi à parler au général Jorge Rafael Videla, en convainquant son aumônier de se faire porter pâle et de célébrer la messe à sa place. Finalement, les deux hommes sont libérés et le
Pape organise leur fuite d'Argentine.

Il tente également d'aider Esther, sa professeure communiste, en cachant ses livres, mais il ne peut pas la sauver. Esther est enlevée, torturée et jetée d'un avion. «Il s'agit d'un génocide générationnel», écrit le Pape, qui ajoute: «Les accusations contre moi se sont poursuivies jusqu'à récemment. C'était la vengeance de certains gauchistes qui savaient combien je m'opposais à ces atrocités...

Jeune responsable des jésuites en Argentine, Jorge Mario Bergoglio tombe en disgrâce et est envoyé en exil à Cordoba en guise de punition. Il se réveille à quatre heures et demie, prie, dans une petite cellule, la numéro 5, avec une salle de bain commune. Il soigne ses frères malades, les lave, dort à leurs côtés, aide à faire la lessive: «Se mettre au service des plus fragiles, des plus pauvres, des derniers, c'est ce que devrait faire tout homme de Dieu, surtout s'il est au sommet de l'Eglise: être un berger avec l'odeur des brebis».

Une fois la punition terminée, l'ascension commence: évêque auxiliaire de Buenos Aires, puis archevêque, puis cardinal. Lorsque Benoît xvi renonce à sa charge, le cardinal Bergoglio est convoqué avec les autres à
Rome.

Dans son autobiographie, il révèle qu'il avait déjà beaucoup de voix dès le début du conclave. «Au premier vote, j'étais presque élu, et à ce moment-là, le cardinal brésilien Claudio Hummes s'est approché de moi et m'a dit: “N'aie pas peur, hein! C'est ce que fait l'Esprit Saint!” Ensuite, au troisième tour de scrutin de l'après-midi, au 70e vote, lorsque mon nom a atteint les deux tiers des voix, tout le monde a applaudi longuement. Alors que le scrutin se poursuivait, Mgr Hummes s'approcha à nouveau, m'embrassa et me dit: “N'oublie pas les pauvres...”. Et c'est là que j'ai choisi le nom que je porterais en tant que
Pape: “François”».

«Lorsque la première dose (de vaccin, ndlr) est arrivée au Vatican, j'ai réservé mon tour immédiatement et j'ai également fait les rappels et, Dieu merci, je n'ai jamais été infecté». Le Pape n'a donc jamais eu le covid. Cependant, il a été hospitalisé à plusieurs reprises pour d'autres raisons, et il a remarqué que «quelques-uns étaient plus intéressés par la politique, par faire campagne, presque déjà en train de penser à un nouveau conclave. Rassurez-vous, c'est humain, il n'y a pas lieu de se scandaliser! Quand le Pape est à l'hôpital, il y a beaucoup de pensées, et il y a aussi ceux qui spéculent pour leur propre compte. Heureusement, malgré les moments difficiles, je n'ai jamais pensé à démissionner». «Je pense que le ministère pétrinien est ad vitam et je ne vois donc pas de conditions pour une renonciation. Les choses changeraient si un grave empêchement physique survenait, et dans ce cas, j'ai déjà signé au début de mon pontificat la lettre de démission qui est déposée à la secrétairerie d'Etat. Si cela devait se produire, je ne m'appellerais pas “Pape émérite”, mais simplement “évêque émérite de Rome”, et je m'installerais à Sainte-Marie-Majeure pour redevenir confesseur et donner la communion aux malades. Mais il s'agit là d'une hypothèse lointaine, car je n'ai pas vraiment de raisons sérieuses de penser à une renonciation. Au fil des ans, quelqu'un a peut-être espéré que tôt ou tard, peut-être à la suite d'une hospitalisation, je ferais une telle annonce, mais ce risque n'existe pas: grâce au Seigneur, je jouis d'une bonne santé et, si Dieu le veut, il me reste encore beaucoup de projets à réaliser».