«Comme l'enseigne le Concile Vatican ii, à une époque marquée par des échos de mort et de guerre, la foi commune en un seul Dieu nous invite et nous encourage à vivre comme des frères». C’est ce qu’a dit le Pape François aux membres de l’Association biblique italienne et aux participants à la xlvii e semaine biblique nationale — en cours à Rome sur le thème «Alliance et alliances entre universalisme et particularisme» — reçus en audience dans la matinée du jeudi 7 septembre, dans la salle Clémentine. Nous publions ci-dessous le discours prononcé par le Pape à cette occasion:
Chers frères et sœurs, bienvenue!
Je suis heureux de vous rencontrer, membres de l'Association biblique italienne et professeurs d’Ecriture Sainte, réunis à Rome pour la xlviie semaine biblique nationale. Le thème que vous avez choisi pour ces rencontres, «Alliance et alliances entre universalisme et particularisme», me tient à cœur et fait partie des préoccupations majeures actuelles de l'Eglise. Les trois alliances sur lesquelles vous réfléchissez impliquent en effet étroitement ses relations avec le monde contemporain.
L'alliance avec Noé se concentre sur la relation entre l'humanité et la création. L'alliance avec Abraham se concentre sur les trois grandes religions monothéistes dans leur matrice commune: la foi en Dieu comme condition d'unité et de fécondité. Enfin, l'alliance du Sinaï concerne le don de la Loi et l'élection d'Israël en tant qu'instrument de salut pour tous les peuples.
Ce sont des thèmes qui traversent l'Ancien et le Nouveau Testament, avec des tensions et des reformulations continuellement oscillantes entre l'universalisme de l'amour de Dieu pour l'humanité, sans -exception, et le particularisme de l'élection, unis par un caractère unificateur: l'irrévocabilité des dons et de l'appel de Dieu (Rm 11, 29), son offre constante et multiple de communion, comme l'a dit saint Jean-Paul ii (cf. Rencontre avec la communauté juive, Mayence, 17 novembre 1980, n. 3).
Réfléchissons donc un instant sur l’actualité de ces trois thèmes et, à la lumière de ceux-ci, sur la valeur de votre travail.
Comme nous l'avons dit, l'alliance de Noé comporte une référence claire à la relation entre l'homme et la création. Dans le récit du déluge (cf. Gn 6-9), Dieu redonne espoir et salut à l'humanité, bouleversée par la haine et la violence, à travers la justice du Patriarche. Cette justice comporte une dimension écologique indispensable, dans la redécouverte et le respect «des rythmes inscrits dans la nature par la main du Créateur» (Lettre encyclique Laudato si', n. 71). L'alliance de Noé donc, jamais rompue par Dieu, continue à nous encourager à un usage équitable et modéré des ressources de la planète, ce qui constitue une préoccupation très sérieuse en ce moment.
Le deuxième thème a pour icône l'alliance d'Abraham, commune aux trois grandes religions monothéistes. Cela aussi est une image d'une grande actualité. Comme l'enseigne le Concile Vatican ii, à une époque marquée par des échos de mort et de guerre, la foi commune en un seul Dieu nous invite et nous encourage à vivre comme des frères. C'est en elle que, «destinés à une seule et même vocation divine, nous pouvons aussi et nous devons coopérer, sans violence et sans arrière-pensée, à la construction du monde dans une paix véritable» (Constitution pastorale Gaudium et spes, n. 92).
Enfin, le troisième thème est celui du don de la Loi et de l'élection du peuple d'Israël. Lui aussi est important. En effet, dans la Bible, contre toute tentation de lecture exclusiviste, le particularisme de l'élection est toujours au service d'un bien universel et ne tombe jamais dans des formes de séparation ou d'exclusion. Dieu ne choisit jamais quelqu'un pour exclure les autres, mais toujours pour inclure tous. L'élection de Dieu a toujours cette dimension sociale et missionnaire. C'est un avertissement important pour notre époque, où des dérives de séparation toujours croissantes creusent des fossés et élèvent des clôtures entre les personnes et entre les peuples, au détriment de l'unité du genre humain, qui en souffre, et du Corps même du Christ, selon le dessein de Dieu.
Votre rencontre, cependant, rappelle une autre valeur que je veux souligner: celle de travailler ensemble au service de la Parole. En effet, elle s'inscrit dans un vaste travail de coopération que l'Association biblique offre de manière permanente à l'Eglise en Italie. Elle a été l'une des premières associations théologiques de ce pays et est encore très présente dans les différentes diocèses, notamment à travers l'animation des semaines bibliques diocésaines, qu'elle soutient en collaboration avec l'Apostolat biblique de la conférence épiscopale italienne. Je forme le vœu que cette présence augmentera sur tout le territoire, évitant toute forme d'élitisme et d'exclusion. L'Association biblique travaille en outre en collaboration avec l’Institut pontifical biblique, à un moment décisif pour la réforme des universités pontificales, où l'alliance entre institutions académiques n'est pas toujours facile. Au contraire, pour de nombreux membres de l'Association, l’Institut pontifical biblique reste toujours l'«alma mater» qui les a engendrés dans la recherche et l'apostolat. Cela offre un exemple de la synergie urgente à promouvoir, à Rome et ailleurs, entre les différents instituts d'études, notamment afin de ne pas courir le risque d'une extinction irrémédiable.
Chers amis, poursuivez votre mission d'aider le peuple de Dieu à se nourrir de la Parole, afin que la Bible soit toujours plus le patrimoine de tous: «Le livre du peuple du Seigneur qui, en l'écoutant, passe de la dispersion et de la division à l'unité» (Lettre apostolique Aperuit illis, n. 4). C'est un peu «la dynamique du Seigneur»: il envoie et il semble ainsi disperser, mais ensuite, Il rassemble dans l'unité. Je vous bénis de tout cœur. Et s’il vous plaît, n’oubliez pas prier pour moi! Merci.