C’est le tout premier document que le dicastère pour la communication publie depuis sa création par le motu proprio du 27 juin 2015. Il s’agit d’un texte qui s’adresse «à tous», a dit Paolo Ruffini, et qui répond à plusieurs questions posées au cours de différentes rencontres, notamment avec les évêques lors de leurs visites ad limina, et «avec divers interlocuteurs à plusieurs niveaux» explique le préfet du dicastère pour la communication.
Le texte présenté à la salle de presse du Saint-Siège lundi 29 mai, qui s’intitule «Vers une présence totale. Une réflexion pastorale à propos de l’engagement sur les réseaux sociaux», vise à promouvoir une discussion commune sur l'implication des chrétiens dans les réseaux sociaux, qui font de plus en plus partie de la vie des gens. Et Paolo Ruffini précise que le texte s’inspire de la parabole du bon samaritain «parce qu’il répond à l’invitation du Pape François à aller à contre-courant».
Pour le secrétaire général du dicastère pour la communication, nous vivons dans une culture amplement numérisée, qui impacte tous les niveaux de la société et face à laquelle l’Eglise ne peut rester passive. «Nous devons sortir» affirme Mgr Lucio Adrian Ruiz, pour lequel une Eglise en sortie doit aussi explorer les périphéries numériques. «Il ne s'agit plus seulement d'utiliser des outils de communication, dit le secrétaire général du dicastère, mais de vivre dans une culture largement numérisée qui a de profondes répercussions […] sur la perception de soi, des autres et du monde, sur la manière de communiquer, d'apprendre, de s'informer et d'entrer en relation avec les autres».
La technologie n'est «jamais» neutre, poursuit-il, «car les artefacts naissent avec une intentionnalité et la recherchent toujours». C'est pourquoi, précise-t-il, l'analyse et le jugement critique sont essentiels pour connaître et vivre la réalité numérique, «qui doit être éclairée par l'Evangile, afin qu'elle respecte toujours la dignité et la finalité de l'homme tout entier et de tous les hommes».
«La nouvelle évangélisation dépendra de la bonne utilisation que l’Eglise fera de la sphère digitale», explique à son tour sœur Nathalie Becquart, citant «les voix du peuple de Dieu» entendues lors des différentes phase de préparation du synode sur la synodalité. La sous-secrétaire du secrétariat général du synode souligne l’opportunité d’un tel document publié au moment où l’Eglise poursuit son parcours synodal. «Il se présente comme une aide au discernement pour permettre à chaque chrétien de réfléchir à sa propre manière d'être présent sur les réseaux sociaux, en lui faisant prendre conscience des défis, des opportunités et des pièges» dit-elle, réitérant le fait que tous les chrétiens sont appelés à être des «tisseurs de communion», à avancer ensemble à travers une présence qui implique l'écoute, le dialogue et le sens de la communauté pour agir comme des «missionnaires de la rencontre».
Pour sœur Nathalie Becquart, ce document «invite à travailler et à discerner ensemble, dans la diversité des communautés chrétiennes, comment cheminer ensemble “onlife”» et renforcer la communion au service d'une mission qui a besoin de la participation de tous les baptisés; aussi bien ceux qui poursuivent leur mission dans le monde «virtuel», que ceux qui annoncent la bonne nouvelle dans le monde «réel».
La technologie n’est pas un «ailleurs», ajoute Paolo Ruffini, mettant en lien les deux mondes, et l’Eglise se doit d’utiliser également le monde virtuel pour «faire communauté», et créer dans cet espace aussi une communion. La dimension réelle et la dimension virtuelle sont presque indissociables l’une de l’autre. Mgr Lucio Adrian Ruiz cite en exemple la vie d’une paroisse, faite de chaleur humaine, de rencontres physiques, d’affections, et qui peut trouver une richesse supplémentaire sur les réseaux sociaux pour créer de nouvelles formes de relations. «Les vieilles choses mourront» dit sœur Veronica Donatello, responsable de la pastorale des porteurs de handicap au sein de la conférence épiscopale italienne, «nous vivons une période de grands défis». Le défi principal est de ne pas rester bloqués sur une position défensive, ne pas avoir peur de la nouveauté et prendre -conscience de la réalité de la paroisse qui «unit les grands-parents et les plus jeunes» poursuit la religieuse; des jeunes plus réceptifs à la communication digitale.
En revanche, nous ne devons pas céder à l’«algorithmocratie», ajoute Paolo Ruffini, soulignant que «le document ne part pas de la technologie». Au contraire, il est centré sur l’homme et non sur la machine
(https://www.fullypresent.website/ en.html), «sur le cœur, pas sur l'algorithme». «Ce n'est pas un directoire, ni une sorte de guide pratique-fonctionnel. Il s'agit d'une réflexion théologique et pastorale qui part du regard de l'Evangile pour provoquer un examen de conscience personnel et collectif». Car en fin de compte, il revient à l’homme «de renégocier les règles, de renégocier les algorithmes » et de se réapproprier les relations. (jean-charles putzolu)