Nous publions la traduction du discours de Tawadros ii au Pape:
Mon frère, Votre Sainteté le Pape François!
Vos Eminences, Messieurs! Le Christ est ressuscité, il est vraiment ressuscité!
C’est une immense joie pour moi aujourd’hui d’être présent ici avec vous, de vous serrer avec mon cœur et pas seulement avec mes mains. Je me réjouis avec vous dans le Christ ressuscité d’entre les morts et je vous remercie de m’avoir donné l’occasion de rendre cette visite.
C’est un honneur pour moi de me trouver sur cette terre où les apôtres ont prêché et qui a été habitée par saint Marc, apôtre et prédicateur en terre d’Egypte, et d’où tant de personnes sont parties pour évangéliser et prêcher au monde entier au nom de notre Seigneur Jésus le Rédemp-teur et Sauveur.
Je voudrais contempler avec vous ce que l’apôtre Paul a écrit d’ici, de Rome, aux Ephésiens: «Ain-si vous recevrez la force de comprendre, avec tous les saints, ce qu’est la Largeur, la Longueur, la Hauteur et la Profondeur» (3, 18). Car l’amour, très chers, est le fondement permanent et la voie principale de la perfection, la seule voie de Dieu, parce que Dieu est amour et quiconque le connaît marche sur les pas de l’amour avec Lui et vers Lui.
Je vois le monde comme un grand cercle centré sur Dieu: chacun d’entre nous se trouve dans un point de ce cercle et chaque fois que nous nous rapprochons de Dieu, c’est-à-dire du centre du cercle, nous nous rapprochons pour cela même les uns des autres, nous nous comprenons par notre proximité avec la lumière divine et notre amour grandit jour après jour en raison de notre proximité avec Dieu-Amour.
C’est un long chemin que nous parcourons ensemble vers Dieu, qui a dit: «Je suis le Chemin» (Jn 14, 6). Parfois, nous sommes appelés «pèlerins» parce que nous le suivons. C’est ainsi que Hénoch a marché avec Dieu (cf. Gn 5, 24) et que Noé a marché avec Dieu (Gn 6, 9); Abraham, David, les disciples d’Emmaüs et tant d’autres, tous ceux qui ont marché avec Lui et l’ont pris comme compagnon de route se sont réjouis. Cependant, la largeur, la longueur, la hauteur et la profondeur de cet amour sont infinies, car il vient de Dieu et ne peut avoir de mesure; nous avons la responsabilité de devenir comme Lui et offrir un amour inconditionnel les uns aux autres et au monde entier. L’un des signes du chemin de l’amour pour tout être humain est la publication de la nouvelle Cons-titution apostolique Praedicate Evangelium, ce dont je vous félicite parce qu’elle est le témoignage de votre sollicitude pour tous les aspects humains.
A travers les sessions de dialogue entre l’Eglise copte orthodoxe et l’Eglise catholique, nous marchons sur le chemin de l’amour, le regard fixé sur Jésus, Celui qui donne naissance à la foi et la mène à son accomplissement (He 12, 2).
Les visites réciproques entre nos Eglises ont commencé en 1962. Il y a ensuite eu la visite de Sa Sainteté le Pape Chenouda iii à la Chaire de Pierre en mai 1973, à la présence de Sa Sainteté le Pape Paul vi. Lors de cette visite, une partie des reliques de saint Athanase d’Alexandrie a été confiée à Sa Sainteté dans le cadre de la célébration du 16e centenaire de sa mort. Il s’agit du pape copte du ive siècle de notre ère. Sa Sainteté le Pape Paul vi a déclaré dans son homélie lors de la célébration que «saint Athanase est un père et un maître pour l’Eglise universelle».
Le 10 mai 1973, les deux chefs de nos Eglises ont signé une déclaration conjointe par laquelle ils convenaient de créer un Comité mixte dont la mission est la direction d’études communes dans les domaines de la tradition ecclésiastique, de la patristique, de la liturgie, de la théologie, de l’histoire, ainsi que des problèmes scientifiques, afin de communiquer ensemble l’Evangile selon des modalités compatibles avec le message originel du Seigneur et avec les exigences et les espoirs du monde d’aujourd’hui.
Nous rendons grâce à Dieu pour la poursuite du dialogue théologique du Comité mixte international entre l’Eglise catholique et les Eglises orthodoxes orientales, que nous avons eu l’honneur d’accueillir lors de sa dernière réunion au Logos Center, la résidence papale en Égypte, et dont nous célébrerons la 20e réunion l’année prochaine.
C’est ainsi que nous avons entamé le dialogue et que nous le poursuivons. Le dialogue est un chemin long mais sûr, protégé par les deux faces de l’amour: celle de l’amour du Christ pour nous et celle de l’amour mutuel. Ainsi, quoi qu’il nous arrive, comme dans les défis auxquels nous sommes confrontés, l’amour nous protège afin que nous puissions poursuivre notre mission et progresser dans la compréhension réciproque. La prière est notre source de soutien mutuel, en prenant nos res-ponsabilités, mettant devant nous les mots de Jean le bien-aimé: «Petits enfants, n’aimons ni de mots ni de langue, mais en actes et en vérité» (1 Jn 3, 18).
C’est précisément parce que les saints sont l’un des principaux piliers de nos Eglises, à commencer par les apôtres Pierre, Paul et Marc, que nous inscrivons désormais dans le martyrologe des Eglises de nouveaux martyrs qui ont gardé la foi et rendu témoignage du Christ. Ils n’ont pas perdu courage face aux tortures et nous ont donné un exemple vivant dans le martyre, «car c’est par sa faveur qu’il vous a été donné, non pas seulement de croire au Christ, mais encore de souffrir pour lui» (Ph 1, 29).
C’est ainsi qu’il en a été pour les 21 martyrs de Libye. Depuis que nous avons reconnu leur sainteté dans l’Eglise copte orthodoxe, nous avons commencé à célébrer chaque 8 amshir, qui correspond au 15 février, la fête des martyrs de l’ère moderne, persécutés au cours des dernières années. Aujourd’hui, nous vous confions une partie de leurs reliques immergées dans leur sang versé au nom du Christ pour l’Eglise, afin que le martyrologe de toutes les Eglises du monde se souvienne d’eux et que nous sachions, nous aussi, que nous sommes «enveloppés d’une si grande nuée de témoins» (He 12, 1). Qu’ils deviennent ainsi un modèle et un exemple contemporain pour le monde entier, témoignant que notre christianisme n’est pas un christianisme historique du passé, mais qu’il est d’hier, d’aujourd’hui et de toujours.
Pour conclure, je remercie Votre Sainteté de m’avoir invité, ainsi que la délégation qui m’accompagne, pour les aimables paroles de bienvenue par lesquelles vous nous avez accueillis, en votre nom et au nom de tous. Je renouvelle ma promesse de me souvenir de vous dans mes prières personnelles, comme nous nous l’étions promis l’un à l’autre lors de ma dernière visite ici. Je prie Dieu de vous accorder une pleine santé, une longue vie et un bonheur éternel.
Je prie avec vous pour l’Eglise de Dieu sur terre, afin qu’il la rende inébranlable dans les siècles des siècles, pour qu’elle puisse toujours élever sa louange au Ciel. Qu’il la garde par son amour empressé et attentif, et nous bénisse tous pour toujours. Amen.