Nous publions le texte du discours prononcé par le Pape François lors de l’audience à Sa Sainteté le Pape Tawadros ii , chef de l’Eglise copte orthodoxe, qui s’est tenue dans la matinée du jeudi 11 mai, dans la bibliothèque privée du palais apostolique:
Votre Sainteté! Chers frères dans le Christ!
«C’est le jour que le Seigneur a fait: réjouissons-nous et ré-jouissons-nous en lui!». C’est par cette acclamation pascale que, il y a cinquante ans, le Pape Paul vi accueillit dans la basilique Saint-Pierre votre vénéré prédécesseur, le Pape Chenouda iii . C’est avec la même acclamation que je vous accueille aujourd’hui, cher frère et cher ami Tawadros. Je vous remercie de tout cœur d’avoir accepté mon invitation à commémorer ensemble le jubilé de cet événement historique de 1973, ainsi que le dixième anniversaire de notre première rencontre en 2013.
Sur le chemin œcuménique, il est important de toujours regarder de l’avant. En cultivant dans le cœur une saine impatience et un ardent désir d’unité, nous devons être, comme l’apôtre Paul, «tournés vers l’avenir» (cf. Ph 3, 13) et nous demander constamment: «Quanta est nobis via?» — Combien de chemin nous reste-t-il à faire? Mais il faut aussi se souvenir, surtout dans les moments de découragement, pour nous réjouir du chemin déjà parcouru et puiser dans la ferveur des pionniers qui nous ont précédés. Regarder de l’avant et faire mémoire. Pourtant, il est sans doute encore plus nécessaire de regarder vers le haut, pour remercier le Seigneur pour les pas accomplis et le supplier de nous faire le don de l’unité espérée.
Remercier et supplier. C’est le but de notre commémoration d’aujourd’hui. La rencontre de nos prédécesseurs, qui a eu lieu à Rome du 9 au 13 mai 1973, a marqué une étape historique dans les relations entre le siège de Saint-Pierre et le siège de Saint-Marc. C’est la première rencontre entre un Pape de l’Eglise copte orthodoxe et un Evêque de Rome. Elle marque aussi la fin d’une controverse théologique remontant au Concile de Chalcédoine, grâce à la signature, le 10 mai 1973, d’une mémorable déclaration christologique commune, qui a servi ensuite d’inspiration pour de tels accords avec d’autres Eglises orthodoxes orientales.
La rencontre a conduit à la création de la Commission mixte internationale entre l’Eglise catholique et l’Eglise copte orthodoxe, qui en 1979 a adopté les Principes pour guider la recherche de l’unité entre l’Eglise catholique et l’Eglise copte orthodoxe, principes pionniers, signés par le Pape saint Jean-Paul ii et le Pape Chenouda iii , dans lesquels il était affirmé, avec des paroles prophétiques, que «l’unité que nous imaginons ne signifie pas l’absorption de l’un par l’autre ou la domination de l’un sur l’autre. Elle est au service de chacun pour l’aider à mieux vivre les dons spécifiques qu’il a reçus de l’Esprit de Dieu».
Cette Commission mixte a ensuite ouvert la voie à la naissance d’un dialogue théologique fécond entre l’Eglise catholique et l’ensemble de la famille des Eglises orthodoxes orientales, qui a tenu sa première rencontre en 2004 au Caire, accueillie par Sa Sainteté Chenouda. Je remercie l’Eglise copte orthodoxe pour son engagement dans ce dialogue théologique. Je suis également reconnaissant à Votre Sainteté pour l’attention fraternelle qu’elle continue d’accorder à l’Eglise copte catholique, proximité qui a trouvé une expression louable dans la création du Conseil national des Eglises chrétiennes en Egypte.
Comme on le voit, la rencontre de nos illustres prédécesseurs n’a jamais cessé de porter des fruits sur le chemin de nos Eglises vers la pleine communion. C’est aussi en souvenir de la rencontre de 1973 que Votre Sainteté vint me rencontrer ici pour la première fois le 10 mai 2013, quelques mois après votre intronisation et quelques semaines après le début de mon pontificat. A cette occasion, vous avez proposé de célébrer chaque 10 mai la «Journée de l’amitié entre coptes et catholiques», qui est célébrée depuis lors ponctuellement par nos Eglises.
En parlant d’amitié, il me vient à l’esprit la célèbre icône copte du viii e siècle représentant le Seigneur qui pose sa main sur l’épaule de son ami, le saint moine Mena d’Egypte. Cette icône est parfois appelée «icône de l’amitié», parce que le Seigneur semble vouloir accompagner son ami et marcher avec lui. De même, les liens d’amitié entre nos Eglises sont enracinés dans l’amitié de Jésus Christ lui-même avec tous ses disciples qu’Il appelle «amis» (cf. Jn 15, 15), et qu’il accompagne sur leur chemin, comme il le fit avec les pèlerins d’Emmaüs.
Sur ce chemin d’amitié, nous sommes également accompagnés par les martyrs, qui témoignent que «personne n’a un amour plus grand que celui-ci: donner la vie pour ses amis» (Jn 15, 13). Je n’ai pas de mots pour exprimer ma gratitude pour le don précieux d’une relique des martyrs coptes tués en Libye le 15 février 2015. Ces martyrs ont été baptisés non seulement dans l’eau et l’Esprit, mais aussi dans le sang, un sang qui est une graine d’unité pour tous les disciples du Christ. Je suis heureux d’annoncer aujourd’hui, qu’avec le consentement de Votre Sainteté, ces 21 martyrs seront insérés dans le Martyrologe romain comme signe de la communion spirituelle qui unit nos deux Eglises.
Puisse la prière des martyrs coptes, unie à celle de la Théotokos, continuer à faire croître dans l’amitié nos Eglises, jusqu’au jour béni où nous pourrons célébrer ensemble sur le même autel et communier au même Corps et Sang du Sauveur, «afin que le monde croie» (Jn 17, 21)!