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Entretien du Pape avec la radiotélévision suisse

L’Eglise est la maison de tous

 L’Eglise est  la maison de tous  FRA-011
16 mars 2023

A l’occasion du dixième anniversaire du pontificat, le Pape a accordé un entretien à la radio-télévision suisse italienne (rsi), diffusé le 12 mars. Avec le journaliste Paolo Rodari, depuis la Maison Sainte-Marthe, l’évêque de Rome évoque les priorités de son pontificat, l’accueil, la guerre en Ukraine et d'autres conflits — Yémen, Syrie, Birmanie —, les relations avec son prédécesseur, ou encore, l’au-delà.

François ne pense pas à démissionner, mais explique ce qui le pousserait éventuellement à le faire: «Une fatigue qui ne permet pas de voir les choses clairement. Un manque de clarté, de savoir évaluer les situations». Lui qui n'a pas vécu à Buenos Aires depuis dix ans, regrette de cette période «de marcher, de descendre dans la rue». Le Pape confie se sentir bien à Rome, «une ville unique», même si les soucis ne manquent pas. Nous sommes «dans une guerre mondiale», dit-il.

«Elle a commencé par morceaux et maintenant personne ne peut dire qu'elle n'est pas mondiale. Les grandes puissances sont toutes impliquées. Et le champ de bataille est l'Ukraine. Tout le monde s'y bat», assure-t-il. Le Pape y affirme aussi que Vladimir Poutine sait qu'il aimerait le rencontrer, «mais il y a là tous les intérêts impériaux, non seulement de l'empire russe, mais aussi des empires d'ailleurs».

«Je lui parlerais aussi clairement que je le fais en public. C'est un homme éduqué. Le deuxième jour de la guerre, je me suis rendu à l'ambassade russe au Saint-Siège pour dire que j'étais prêt à aller à Moscou si Poutine me donnait une fenêtre de négociation. Lavrov m'a écrit pour me remercier, mais ce n'est pas le moment. Poutine sait que je suis disponible», a déclaré François.

Le Saint-Père revient aussi sur ses diminutions physiques confiant «avoir eu un peu honte» de se déplacer en fauteuil roulant: «La blessure au genou a été une humiliation physique, même si elle guérit bien maintenant».

Le Pape admet au long de l’entretien sa préférence «pour les laissés-pour-compte», mais dit que cela ne veut pas dire «qu’il rejette les autres». «Les pauvres sont les préférés de Jésus. Mais Jésus ne renvoie pas les riches», relève-t-il.

«Cela signifie que personne n'est exclu. Lorsque les participants à la fête ne venaient pas, il disait d'aller à la croisée des chemins et d'appeler tout le monde, les malades, les bons et les mauvais, les petits et les grands, les riches et les pauvres, tout le monde. Nous ne devons pas oublier ceci: l'Eglise n'est pas une maison pour certains, elle n'est pas sélective. Le peuple saint et fidèle de Dieu, c'est cela: tout le monde», souligne l’évêque de Rome.

Répondant à une question sur le sentiment d’exclusion ressenti par certaines personnes en raison de leur condition de vie, François a répété que le péché est toujours présent: «C'est un peu la vanité du monde, se sentir plus juste que les autres, mais ce n'est pas juste. Nous sommes tous pécheurs. A l'heure de la vérité, mettez votre vérité sur la table et vous verrez que vous êtes un pécheur».

Le Pape est aussi revenu sur son choix inédit de vivre à la Maison Sainte-Marthe, au lieu du Palais apostolique. «Deux jours après l'élection, je suis allé prendre possession du Palais apostolique. Il n'est pas très -luxueux. Il est bien fait, mais il est énorme. J'ai eu l'impression d'un entonnoir inversé. Psychologiquement, je ne peux pas supporter cela. Par hasard, je suis passé devant la chambre où je vis. Et je me suis dit: “Je vais rester ici”. C'est un hôtel où vivent quarante personnes qui travaillent à la curie. Et les gens viennent de partout».

Interrogé sur ses origines «presque du bout du monde», le Pape a cité la philosophe argentine Amelia Podetti: «La réalité est mieux vue des extrêmes que du centre. De loin, on comprend l'universalité. C'est un principe social, philosophique et politique».

Enfin, évoquant les dix années de Benoît xvi à Mater Ecclesiae, le Pape a déclaré: «C'est un homme de Dieu, je l'aime beaucoup. La dernière fois que je l'ai vu, c'était à Noël. Il pouvait à peine parler. Il parlait tout bas, tout bas. Il fallait traduire ses paroles. Il était lucide. Il posait des questions: comment ça va? Et ce problème-là? Il était au courant de tout. C'était un plaisir de parler avec lui. Je lui demandais des avis. Il donnait son avis, mais toujours équilibré, positif, un homme sage. La dernière fois, cependant, on pouvait voir qu'il était sur la fin».