Nous publions ci-dessous le discours improvisé par le Pape au cours de l’audience aux participants à la plénière du dicastère pour la communication:
Chers frères et sœurs, bonjour et bienvenue!
Je remercie M. Paolo Ruffini pour ses aimables paroles, et je vous salue, vous tous qui participez à l’assemblée plénière du dicastère pour la communication, qui a pour thème «synode et communication: un parcours à développer». Et voici le message, huit pages — si je commence à les lire, quand j’arriverai à la quatrième, vous aurez oublié ce que j’ai dit dans la première! Et je pense qu’il vaut mieux que vous emportiez ce message avec vous, M. Ruffini nous en donnera une copie à tous. Et ainsi, je peux vous dire quelque chose de plus spontané et aussi «hors censure», ce qui est plus amusant!
Lorsque nous parlons de communication, nous parlons d’un «aller-retour», il n’y a pas de communication dans une seule direction: elle va et revient, elle va et revient. Et c’est ainsi aussi que l’on croît. Il n’y a que les perroquets qui communiquent sans retour, parce qu’ils disent toujours la même chose, et peu importe ce qu’est l’écho, ce qu’on dit de l’autre côté. Un vrai communicateur doit être attentif au retour, à ce qui vient, à la réaction que provoque ce que je dis. Parce que la communication est un lien humain. Ce n’est pas ce que je dis qui est important, non, mais ce que je dis à ce que l’autre me dit, à ce que j’écoute. C’est pourquoi la philosophie «du haut-parleur» ne sert pas; c’est plutôt une philosophie, disons, «au téléphone»: on écoute, on répond.
Le dialogue: il ne peut y avoir de communication sans dialogue et sans mouvement, sans bouger, et cela est toujours un risque. Parce que nous avons cette loi de l’inertie, de l’inertie qui vous pousse, toujours assis sur la même chose, à dire les choses, à donner les nouvelles et puis à se taire. Non, tu dois écouter comment cette chose est reçue, et quelle réaction elle provoque. Et c’est pour cela que certains d’entre vous me touchent beaucoup, par exemple l’enthousiasme de Monda [directeur de l’Osservatore Romano]. Monda n’est pas un journaliste, c’est un poète, un créateur, parce qu’il communique en poésie, il écoute avec créativité ce que les gens disent... Et puis L’Osservatore — oui, L’Osservatore est un problème, nous le savons tous — et au lieu de fermer L’Osservatore, il en fait un autre, celui «di Strada» [de la rue, l’édition des sans-abris ndlr] et allez! Cela est communiquer, chercher toujours les frontières, d’autres, d’autres... L’inquiétude de communiquer. Et cela comporte un certain désordre. Le communicateur ne peut pas tout avoir en ordre, il y a toujours un peu de désordre, parce que nous sommes ainsi, nous humains. Et je vois des choses comme ça parmi vous.
Par exemple — ceci d’autre part, mais je veux le dire — j’ai fait deux entretiens filmés avec Fabio Marchese Ragona, et j’ai vu dans ces communications la capacité de créer des choses qui ont eu une grande écoute, parce qu’il y avait cette recherche d’aller vers l’autre.
Et même, quand je lis parmi vous, par exemple, un article d’Alessandro Gisotti: si vous lisez Gisotti, il ne fait pas qu’une réflexion, non, il fait une réflexion et crée des tensions intérieures. Pour ne citer que quelques communicateurs... Cela est communiquer, est risquer, est créer, est aller au-delà. Un communicateur qui veut tout avoir en ordre, s’est trompé de profession, il vaut mieux faire l’archiviste cela sera mieux fait! Le communicateur doit toujours prendre des risques, toujours sur la route, être toujours engagé dans la vie.
Voilà ce qu’est la communication. Et je remercie le préfet [Paolo Ruffini] — le pauvre, il a la malédiction d’être le premier préfet laïc dans la curie! —, je le remercie parce qu’il permet cela, il laisse grandir. «Dois-je grandir encore plus?». Vous le savez mieux que moi, mais vous laissez grandir. Je vous remercie pour ça. C’est ce que je vois dans votre dicastère. communication en mouvement, créative.
Ensuite, la communication des valeurs. Nous ne pouvons pas nous contenter d’une communication sans valeurs. Nous devons communiquer avec nos valeurs. Cela ne veut pas dire que nous devons prier la neuvaine à un saint tous les jours. Les valeurs chrétiennes, les valeurs qui sont derrière, les valeurs qui enseignent à aller de l’avant. La personne qui se met en jeu pour les valeurs humaines. Par exemple, je vois ici James Martin. «Ah oui, celui-là travaille...». Oui, mais cette personne a écrit un livre qui s’appelle «Pour apprendre à prier» [Insegnaci a pregare, apprends-nous à prier]. Lisez-le, parce que cela vous apprend à prier. Un homme qui a des valeurs, un communicateur qui sait aussi comment t’enseigner la voie de communication avec Dieu. Etre communicateur, c’est cela. Aller, marcher, prendre des risques, avec des valeurs, convaincu que je donne ma vie avec mes valeurs, les valeurs chrétiennes et les valeurs humaines. Je me méfie des communicateurs aseptiques, ceux qui ne sont que pure technique, pure. Oui, mais la technique seule ne sert pas, la technique nous aide si derrière il y a un cœur, il y a un esprit, s’il y a un homme, une femme qui donne du sien. Veillez à ne pas glisser dans la technique uniquement, parce que cela vous conduit à une communication aseptique, privée de valeurs, et qui peut ensuite tomber aux mains des comptables ou des idéologies du moment.
Et puis une troisième chose que je trouve dans votre dicastère, Mon-sieur le préfet, et je vous en remercie, c’est l’humanisme. Vous avez donné un climat humain, et cela doit être conservé. Une communication humaine, avec la chaleur humaine et pas purement technique. La tech-nique est nécessaire pour le développement, mais si l’humain est là. Quand vous [il s’adresse à sœur Veronica Donatello] allez chez les sourds-muets et que vous faites ça, comme ça [la langue des signes], vous connaissez toute la tech-nique mais il y a votre cœur humain de femme, de mère, de sœur, qui est derrière cette communication. C’est très important, communiquer avec le cœur et avec l’humain, avec les valeurs, et aller de l’avant.
Voilà les choses que je voulais vous dire, les choses qui me frappent le plus. Espérons que Monda ne fasse pas un troisième Osservatore Romano, parce qu’il est tellement enthousiaste qu’il ne s’arrête plus! Merci, merci pour tout, vraiment, merci! Je suis content et allez de l’avant, prenez des risques, prenez des risques, n’ayez pas peur! Risquez, pour rencontrer l’autre dans la communication.
Et maintenant demandons au Seigneur qu’il nous bénisse tous, car nous avons tous besoin de la bénédiction de Dieu.