Si Lazare a un prénom, le riche n’a d’autre identité que d’être riche comme si toute sa vie, passée à accumuler du périssable dans l’ignorance de celui qui mendiait à sa porte, avait éteint en lui ce qui pouvait s’épanouir en vie éternelle. Et le fossé infranchissable évoqué par Abraham semble comme le miroir de celui creusé sa vie durant pour se soustraire à la fraternité à laquelle notre commune filiation divine nous convoque. Le refus d’être frères ne relie pas au Père. S’agissant de la fraternité avec le plus pauvre, comment ne pas se trouver en deçà de ce que nous sommes appelés à vivre? Paul vi écrivait en 1967: «Le combat contre la misère, urgent et nécessaire, est insuffisant. Il s’agit de construire un monde où tout homme, sans exception de race, de religion, de nationalité, puisse vivre une vie pleinement humaine, (…) un monde où la liberté ne soit pas un vain mot et où le pauvre Lazare puisse s’asseoir à la même table que le riche (...) Sinon, ajoutait-il, l’avarice prolongée [des riches] ne pourrait que susciter le jugement de Dieu et la colère des pauvres, aux imprévisibles conséquences». C’était il y a 55 ans! La pointe de la parabole: «S'ils n'écoutent pas Moïse ni les Prophètes, quelqu'un pourra bien ressusciter d'entre les morts: ils ne seront pas convaincus», nous vise autant que les auditeurs de Jésus. Il ne s’agit pas de chercher dans cette histoire une description de l’au-delà, mais d’entendre un avertissement qui nous déloge de l’illusion d’une posture avantageuse pour nous réveiller, sans attendre que quelqu’un ressuscite des morts. Mais s’il est déjà ressuscité, comme nous le confessons, qu’est-ce que cela engage concrètement comme fraternité à oser ici et maintenant qui puisse être dans nos vies une semence d’éternité? Comme les dimanches précédents, c’est le fondement réel de notre existence qui est interrogé.
*Aumônier national catholique des prisons de France et d’Outre-Mer
Mes conversions m’offrent la Vie
J’ai, adulte, adopté le regard du Christ sur la Cité,
en accueillant, comme Saint-Paul, une nouvelle vie offerte par Dieu,
et des conversions m’ouvrant à grandir en humanité.
Je deviens, grâce à l’Esprit, un apôtre, un vrai Je radieux.
Etre un Je et m’offrir
O Jésus, je veux sortir de la misère, de mes faiblesses,
pour enfin donner de mes biens, de mon temps, en âme dévouée;
ta solitude, ton besoin de pain, sont des plaies; elles me blessent;
mon amour, parfois, assouvit des faims et des soifs avouées.
Frank Widro
L’Evangile en poche
Dimanche 25 septembre,
xxvie du Temps ordinaire
Première lecture: Am 6, 1.4-7
Psaume: 145
Deuxième lecture: 1 Tm 6, 11-16
Evangile: Lc 16, 19-31
Bruno Lachnitt*