· Cité du Vatican ·

Invincible

Un bambino siriano di 5 anni, nato senza braccia e gambe, immortalato sorridente con il padre, ...
23 août 2022

Il y a quelques jours, mon épouse et moi sommes allés à Sienne et après avoir été bombardés par la beauté de la ville, le soir, grâce à l’invitation de l’archevêque, Mgr Paolo Lojudice, nous avons subi le «bombardement» d’un autre type de beauté. Don Paolo nous a emmenés à Arbia, à quelques kilomètres de Sienne, dans un centre d’accueil pour familles. Il est géré par Maria et Paolo qui, avec peu de -moyens et un grand cœur, réalisent le bien caché qui fait fleurir et progresser le monde entier, parce que, comme l’avait pressenti Tolkien, «ce qui est vraiment important est toujours caché à nos contemporains, et les graines de ce qui doit être germent tranquillement dans l’obscurité, dans un coin oublié».

Dans ce coin oublié de la campagne de Sienne, nous avons rencontré cinq familles de réfugiés, migrants, marginalisés, les derniers de la société dont quelques personnes, en général les «avant-derniers» prennent soin. Et là, nous avons re-vu, parce que le monde entier l’a vu, le petit Mustafa. Il s’agit de l’enfant syrien de six ans, sans bras ni jambes à cause des bombes au phosphore utilisées dans cette guerre oubliée et encore dramatiquement en cours, qui a été immortalisé alors qu’il est soulevé par son père (qui a lui aussi perdu une jambe dans l’explosion d’une bombe «normale») dans la photo qui a fait le tour du monde il y a quelques mois, devenant en peu de temps «la photo de l’année».

C’est une chose de voir Mustafa en photo, c’en est une autre de le rencontrer. Lorsque nous sommes arrivés, il était occupé à jouer à un jeu vidéo sur une tablette: avec son «doigt», il cliquait et gagnait. Il nous a regardés en levant les yeux et, en riant, s’est exclamé en un parfait italien: «Bonjour à tous!». Mustafa rie souvent, et bouge tout le temps. Nous l’avons vu monter et descendre les escaliers (je n’ai pas encore compris comment, mais son corps est en fait un puissant ensemble de muscles), monter sur un skateboard et se lancer à toute vitesse d’un bout à l’autre de la pièce, tout joyeux; nous l’avons vu, ou plutôt ma femme l’a vu (les femmes ont un regard plus attentif) tandis que, de sa tête, il berçait le berceau de sa petite sœur qui est née depuis un mois à peine: ils l’ont appelée Maria, comme la responsable de la maison.

Nous sommes rentrés à la maison ébranlés et heureux par toute cette vitalité, et d’une certaine façon «interrogés».

Il m’est venu à l’esprit ce beau livre, Blanc sur noir, de Ruben Gallego, un écrivain né plus ou moins dans les conditions de Mustafa, mais qui, dans son récit, veut écrire à propos «de la force qui est en chacun de nous. De la force qui surmonte toutes les barrières et vainc» parce que, ajoute-t-il, «je suis persuadé que sur la balance de l’humanité, la joie d’un enfant pour un jouet neuf vaut beaucoup plus que toute victoire militaire. Ce livre raconte mon enfance. Atroce, terrible, mais qui reste une enfance. Pour continuer à aimer le monde, pour grandir et devenir adulte, un enfant a besoin de bien peu: un morceau de lard, un sandwich avec du saucisson, une poignée de dattes, le ciel bleu, quelques livres et une parole affectueuse. Cela suffit. Cela suffit amplement». Ruben avec son livre et Mustafa avec son sourire écrivent «noir sur blanc», ils font vaincre la lumière sur les ténèbres.

Les vers écrits en 1954 par Albert Camus se passent de commentaires, il suffit de souligner que ce qui compte ici sont les deux premiers mots de la poésie, tout part de là:

Ma chère

Au milieu de la haine,

j’ai trouvé qu’il y avait en moi

un amour invincible.

Au milieu des larmes,

j’ai trouvé qu’il y avait en moi

un sourire invincible.

Au milieu du chaos,

j’ai trouvé qu’il y avait en moi

un calme invincible.

J’ai réalisé à travers tout cela que,

au milieu de l’hiver,

il y avait en moi

un été invincible,

et cela me rend heureux,

car il dit que peu importe

combien le monde

pousse contre moi,

en moi, il y a quelque chose

de plus fort,

quelque chose de mieux

qui pousse de retour.

Andrea Monda