Simon-Pierre lâche son travail pour que Jésus puisse enseigner depuis sa barque la foule massée sur la rive. On peut se faire une idée de cet enseignement au chapitre précédent: La bonne nouvelle du règne de Dieu! Alors vient cette invitation: «Avance au large, et jetez vos filets pour la pêche!» Les filets qu’il était en train de laver après une nuit passée sans rien prendre. Mais «sur [sa] parole» il va jeter les filets. Cette parole lancée depuis sa barque devait avoir cette autorité qui suscite, qui appelle. Pierre fait confiance, s’appuie sur cette parole et l’improbable arrive! La «pêche du siècle»! Mais il ne s’y trompe pas. S’il appelle ses camarades pour remonter les filets, aussitôt il se reprend: comme Isaïe, il est saisi de frayeur, il reconnaît dans cet événement le passage de plus grand que lui, trop grand, ça le dépasse, ça le ramène à ce qu’il est: pécheur, plus celui qui prend des poissons, mais celui qui ne peut voir Dieu sans mourir. Mais cette même parole qui l’avait poussé à jeter les filets, chasse la crainte et l’invite encore à prendre le large, mais autrement: «désormais ce sont des hommes que tu prendras». Alors, cette «pêche du siècle», il la plante là sur le rivage, «et, laissant tout, ils le suivirent». Si on ne regarde pas ça de loin comme un beau tableau émouvant, si ça rejoint en nous ce coin secret où une parole qui vient de plus loin que nous suscite une mise en route qu’on n’avait pas prévue, c’est source de joie.
Si nous laissions déjà notre cœur prendre le large avant de penser à jeter les filets? C’est dans notre cœur, pas dans la tête, qu’il s’agit d’entendre l’Evangile, de vivre à l’heure de la grâce, et la clé de la grâce c’est cette gratuité qui nous déborde, cette profusion qui nous met à genou, comme Pierre parce qu’elle nous remet à notre place. Pas celle du comptable qui croirait que tout est dû mais celle d’un pauvre qui sait accueillir le moindre don comme un cadeau et sans cesse dire «merci»!
*Aumônier des prisons de France et d’Outre-Mer
Etre apôtre, te convertir
Je clame, tel Simon, Maître, je t’entends; par Lui je jubile,
et lance mon filet dans l’inconnu, confiant; j’en suis ravi;
ma parole trouve un écho en toi, peut remuer notre ville,
si j’accepte en nos dialogues d’être changé, d’entrer dans la Vie.
L’Esprit, ta conversion et moi
J’ai, comme Simon, le sentiment d’être bien souvent inutile;
Jésus Christ m’entend dire: «Je prends des frères, cela me ravit»;
grâce à l’Esprit, je connais les paroles pour t’offrir la Vie,
si déjà j’y entre, suis devenu une âme droite et fertile.
Franck Widro
L’Evangile en poche
Dimanche 6 février, v e du Temps ordinaire
Première lecture: Is 6, 1-2.3-8
Psaume: 137
Deuxième lecture: 1 Co 15, 1-11
Evangile: Lc 5, 1-11
Bruno Lachnitt*