La lettre est envoyée au cardinal Reinhard Marx mais elle est destinée à tous, à chaque catholique qui vit aujourd’hui sur la terre. Aujourd’hui et demain. Il est facile de prévoir que cette -brève lettre représentera l’un des textes les plus importants du pontificat du Pape François. Encore une fois, Jorge Mario Bergoglio exerce la paternité d’une manière libre et qui fait autorité avec l’un de ses fils (qu’il appelle «frère» qu’il «aime»), au moyen d’une lettre qui va bien au-delà d’une réponse formelle à un évêque qui lui a présenté sa démission. La portée de cette lettre est grandiose et durable. Il s’agit d’un texte qui va accroître l’héritage déjà très riche du Pape François. Un héritage qui s’ajoute à celui bimillénaire de l’Eglise, qui commence avec celui de Pierre que le Pape décrit dans sa lettre avec une précision poignante (c’est le passage le plus intense et touchant de tout le texte): «C’est le chemin de l’Esprit que nous devons suivre, et son point de départ est l’humble confession: nous nous sommes trompés, nous avons péché. Ni les enquêtes, ni le pouvoir des institutions ne nous sauveront. Le prestige de notre Eglise, qui tend à cacher ses péchés, ne nous sauvera pas; le pouvoir de l’argent ou l’opinion des médias (dont nous sommes souvent trop dépendants) ne nous sauveront pas. Nous nous sauverons grâce à la porte de l’Unique qui peut le faire, en confessant notre nudité: “j’ai péché”, “nous avons péché”... en pleurant et en balbutiant tant bien que mal ce “éloigne-toi de moi car je suis pécheur”, héritage que le premier Pape a laissé aux Papes et aux évêques de l’Eglise. Et nous ressentirons alors cette honte qui guérit qui ouvre les portes à la compassion et à la tendresse du Seigneur qui est toujours proche de nous».
Pleurer et balbutier notre propre indignité: voilà l’héritage de Pierre que François fait sien et offre à l’attention de chaque fidèle catholique. C’est également par là que passe toute vraie réforme de l’Eglise. Le Pape le rappelle en mentionnant implicitement le sillage de ses prédécesseurs qui ont déjà assumé l’héritage du premier Pape, le pêcheur de Capharnaüm: «Un “mea culpa” face à tant d’erreurs historiques du passé plus d’une fois dans de nombreuses situations, bien que nous n’ayons pas personnellement participé à cette situation historique. Et c’est cette même attitude qui nous est demandée aujourd’hui. Il nous est demandé une réforme, qui — dans ce cas — ne consiste pas dans des paroles, mais dans des attitudes qui aient le courage d’affronter la crise, d’accepter la réalité, quelles que soient les conséquences. Et toute réforme commence par soi-même. La réforme dans l’Eglise a été faite par des hommes et des femmes qui n’ont pas eu peur d’entrer en crise et de se laisser réformer par le Seigneur. C’est l’unique chemin, autrement nous ne serons rien d’autre que des “idéologues de la réforme” qui ne mettent pas en jeu leur propre chair».
Le 12 mars 2000, au cours de l’année du grand jubilé, l’Eglise prononça par la bouche de Jean-Paul